L'équilibre mondial se modifie. Les États-Unis tendent à s'isoler de leurs alliés et de leurs partenaires commerciaux. Cette situation « crée des dommages » et inquiète Paul Martin. Malgré ce contexte, le Canada peut quand même tirer son épingle du jeu, croit l'ex-premier ministre, qui recevra aujourd'hui un doctorat honorifique de l'Université McGill.

DE GRANDS VIRAGES

Depuis le départ de Barack Obama, la politique internationale américaine a pris d'importants virages. En quelques mois, le président Donald Trump s'est dissocié de l'accord de Paris sur le climat. Il a remis en question les ententes de libre-échange avec le Canada et le Mexique. Et il a, entre autres, indisposé ses alliés européens sur des questions commerciales et militaires. « Le Canada et l'Europe ne veulent pas que l'économie la plus puissante au monde, et leur plus grand allié, reste à l'écart, dit Paul Martin. Et je suis convaincu qu'à long terme, les Américains non plus. »

RÉALIGNEMENT DES PUISSANCES

Le 21e premier ministre du Canada s'attendait à un réalignement des puissances économiques. Au fil du temps, la Chine, l'Inde et d'autres pays en croissance seront appelés à prendre leur place dans l'ordre mondial. C'est inévitable. « Mais je n'avais pas prévu que les États-Unis poseraient ces gestes, dit-il. Ça prendra peut-être quatre ans, mais ça ne durera pas. Ils vont revenir au jeu. » Pendant ce temps, précise M. Martin, les grands pays continueront toutefois d'avancer. Cette nouvelle donne ouvre une porte au Canada. 

PLUSIEURS CARTES

« Même si on est petit, lorsqu'il y a plusieurs joueurs autour de la table, on peut jouer un rôle prépondérant si on est très habile, dit M. Martin. Car les grands ont besoin d'alliés. » Selon lui, le Canada possède plusieurs cartes. « Justin Trudeau est très bien vu à l'international, dit-il. Et c'est une raison pour laquelle on peut jouer ce rôle-là. Il apporte une image plus jeune, plus ouverte et plus dynamique du Canada à l'étranger. » Il fait aussi confiance à la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland et au ministre des Finances Bill Morneau. De même qu'à la « compétence des fonctionnaires » fédéraux.

DES OCCASIONS 

Le président Trump a « créé des dommages » en se retirant de l'accord sur le climat et en contestant les accords commerciaux, estime l'ex-premier ministre. « C'est inquiétant », précise-t-il. Du coup, il propose au Canada de prendre la balle au bond et de mettre des efforts pour développer une industrie verte. Et aider les entreprises à créer des technologies environnementales. Du côté commercial, il appelle le Canada à demeurer dans de grands ensembles. Pendant ce temps, le président Trump a annoncé la sortie des États-Unis du Partenariat transpacifique, regroupant 11 autres pays de la zone pacifique, incluant le Canada.

ROUTE DE LA SOIE

Paul Martin suggère, notamment, de participer au développement de la nouvelle Route de la soie. L'objectif est de relier l'Asie et l'Europe par des réseaux d'autoroutes, de chemins de fer et des liens maritimes. La grande Route touchera 68 pays, soit près des deux tiers de la population mondiale. Conçu par la Chine, ce projet monumental regroupera plus de 40 % du PIB mondial. « Le Canada doit y être pour les infrastructures et pour faire des affaires », dit-il.

INSTITUTIONS INTERNATIONALES

Cofondateur du G20, qui réunit les chefs d'État et les ministres des Finances de nombreux pays, Paul Martin souligne aussi l'importance de jouer un rôle actif dans les grandes institutions multilatérales. « La mondialisation des marchés ne peut pas fonctionner sur la seule base des ententes entre pays, prévient-il. Ça prend des institutions internationales. Les États-Unis sont en train de ne plus les supporter. Mais le Canada peut se démarquer. »

Éducation autochtone: un nouveau programme à Kahnawake

Aujourd'hui, lors de la remise de son doctorat honorifique par l'université McGill, l'allocution de Paul Martin aux finissants de la faculté d'éducation portera sur les peuples autochtones.

Par l'entremise de l'Initiative de la famille Martin, l'éducation des Premières Nations, de la Nation métisse et des Inuits est au coeur de ses activités. Des programmes pour contrer le décrochage scolaire et pour enseigner l'entrepreneuriat sont offerts dans plus de 80 écoles aux pays.

Depuis janvier, un cours d'entrepreneuriat est enseigné au Centre d'éducation des adultes de Kahnawake, souligne l'ex-premier ministre du Canada.

« C'est un premier projet avec des adultes, dit-il, et nous avons l'intention de l'entendre dans le reste du pays. »

Au Québec, un programme d'entrepreneuriat est offert aux jeunes de la communauté crie de l'école secondaire Voyageur Memorial, à Mistissini, au nord du 50e parallèle.