Le gouvernement Trudeau  s'apprête à mettre en laisse le directeur parlementaire du budget - reconnu comme l'un des chiens de garde des contribuables puisqu'il publie des analyses impartiales sur les coûts de programmes ou de mesures envisagées par Ottawa - en lui imposant de nouvelles conditions tout en lui octroyant le statut d'agent du Parlement.

Ces nouvelles conditions sont incluses dans le projet de loi C-44 visant à mettre en oeuvre le dernier budget déposé par le ministre des Finances Bill Morneau aux Communes le 22 mars.

L'une de ces conditions ferait en sorte que le directeur parlementaire du budget présente à l'avance aux présidents de la Chambre des communes et du Sénat les études qu'il compte réaliser durant l'année. En outre, les députés et les sénateurs ne pourraient plus demander au directeur parlementaire du budget des études sur des sujets spécifiques comme c'est le cas présentement. Enfin, le directeur parlementaire du budget serait tenu d'évaluer les coûts des plateformes électorales des partis politiques ayant une représentation à la Chambre des communes avant les élections fédérales.

Les libéraux de Justin Trudeau ont promis durant la dernière campagne électorale d'accorder le statut d'agent du Parlement au directeur parlementaire du budget, au même titre que le vérificateur général, le commissaire aux langues officielles, le directeur d'Élections Canada ou encore le commissaire à l'éthique, entre autres. En tout, on compte sept agents du Parlement qui ont des mandats précis accordés par le Parlement.

Les libéraux n'avaient toutefois pas détaillé les conditions de fonctionnement du directeur parlementaire du budget, une fois qu'il obtiendrait le statut d'agent du Parlement.

Dans une étude publiée hier, le directeur parlementaire du budget, Jean-Denis Fréchette, a mis en garde le gouvernement Trudeau contre les changements qu'il propose, soulignant que ces nouvelles conditions auraient pour effet de limiter considérablement la marge de manoeuvre et l'indépendance de son organisation.

« Les modifications proposées imposent d'importantes restrictions à la façon par laquelle le DPB établit son plan de travail et obtient l'information. Ces restrictions nuisent à l'indépendance fonctionnelle du DPB et minent sa capacité à appuyer efficacement les parlementaires pour ce qui est d'examiner les dépenses gouvernementales et de demander des comptes au gouvernement », affirme d'emblée M. Fréchette dans son analyse.

Il a aussi souligné qu'aucun autre agent du Parlement n'est tenu de faire approuver à l'avance son plan de travail par les présidents de la Chambre des communes et du Sénat. Une telle mesure empêcherait par exemple le directeur parlementaire du budget de préparer de nouveaux rapports en réponse à l'évolution de l'économie canadienne par exemple. Si le Canada entrait en récession, ou était frappé par une catastrophe naturelle importante ou décidait de déployer des troupes à l'étranger, le directeur parlementaire du budget ne serait pas en mesure de fournir rapidement des analyses aux parlementaires.

En conférence de presse, hier, M. Fréchette a dit souhaiter que le gouvernement Trudeau accepte de modifier le projet de loi pour tenir compte de ses inquiétudes, lesquelles ont aussi été exprimées par les députés de l'opposition.