La FTQ s'inquiète de voir renaître de ses cendres une loi «antisyndicale» qu'elle croyait morte, adoptée par le gouvernement Harper, que le gouvernement Trudeau avait promis d'abolir.

Le projet de loi C-4 avait été déposé par le gouvernement Trudeau, dans les mois suivant son élection, afin de respecter son engagement électoral d'abolir deux lois du précédent gouvernement Harper que les syndicats partout au pays avaient dénoncées.

L'une de ces lois obligeait les syndicats à déclarer toute dépense qui dépasserait un certain montant; l'autre visait à les obliger à tenir des votes secrets, plutôt que de faire signer des cartes d'adhésion, lorsqu'ils veulent fonder un syndicat.

Le projet de loi C-4 a suivi normalement les premières étapes du processus législatif. Mais, surprise, juste avant l'ajournement de Pâques, les sénateurs l'ont amendé pour en conserver la section qui oblige les syndicats à tenir un vote secret plutôt qu'à faire signer des cartes.

La FTQ et Teamsters Canada n'en reviennent tout simplement pas, eux qui croyaient que ce dossier était mort et enterré.

Au cours d'une entrevue vendredi, le président de la FTQ, Daniel Boyer, s'est fait pressant face au gouvernement Trudeau, l'invitant à tenir sa promesse et à retourner le projet de loi dans sa forme initiale au Sénat.

«Je ne peux pas dire qu'on n'est pas inquiet. Quand on pense que les choses sont réglées et que le Sénat vient retourner le projet de loi à la Chambre des communes, on peut avoir certaines inquiétudes. Mais, en même temps, moi j'ai confiance que le gouvernement Trudeau a promis ça. Et il l'a fait dès le début de son mandat. J'ai confiance qu'il suive dans la même veine», a confié M. Boyer.

Même son de cloche chez Teamsters Canada, où le président François Laporte a demandé au gouvernement Trudeau de rejeter ces amendements à C-4.

«Ne permettez pas au Sénat non élu de faire passer les intérêts des grandes entreprises avant la volonté d'un gouvernement démocratique», a-t-il commenté.

Si les syndicats préfèrent procéder par signatures de cartes plutôt que par vote secret, lorsqu'ils veulent fonder un syndicat, c'est que la signature de cartes est plus discrète.

«Quand on vient tenir un vote obligatoire, on vient permettre à l'employeur d'être une partie intéressée dans la procédure. On vient dire «à telle heure, tel jour, il va y avoir un vote'. Bien sûr, l'employeur est dans la shop et nous, le syndicat, on n'est pas dans la shop. Lui, l'employeur, il va influencer les employés pour qu'ils votent contre le syndicat, les influencer jusqu'à les intimider», a expliqué M. Boyer.

Les organisations patronales, de leur côté, estiment qu'un vote secret refléterait mieux la volonté réelle des travailleurs.

M. Boyer ne comprend pas pourquoi cette volonté de forcer la tenue d'un vote secret revient dans l'actualité, alors que le processus actuel de signatures de cartes existe depuis des décennies. «Est-ce qu'on a eu des problèmes avec cette façon de faire? Le processus actuel fait la job. On ne voit pas pourquoi on le changerait. Le droit de se syndiquer est prévu aux chartes des droits et libertés», s'exclame-t-il.