Un jour après que la ministre des Affaires étrangères eut mis en garde les Canadiens contre une menace russe qui plane sur l'intégrité du système démocratique, sa collègue aux Institutions démocratiques a reconnu qu'il n'y avait aucune preuve de l'existence d'un tel péril.

«Nous n'avons pas de cas spécifique ou d'exemples de tentatives directes d'influencer notre démocratie», a affirmé Karina Gould lorsqu'elle a été invitée à faire le point sur la question à sa sortie de la réunion du cabinet, mardi.

«Il n'y a pas de cas ici au Canada de (cyberattaques) sur la démocratie», a spécifié la jeune ministre âgée de 29 ans lors d'un bref point de presse dans le foyer de la Chambre des communes.

Vingt-quatre heures plus tôt, au même endroit, la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, prévenait qu'il ne faudrait pas s'étonner d'une éventuelle ingérence de Moscou dans le processus démocratique canadien.

«Ce n'est pas un secret, et les officiels américains l'ont dit publiquement, et même (la chancelière allemande) Angela Merkel l'a dit publiquement, qu'il y a eu des efforts du côté de la Russie, de déstabiliser la démocratie dans l'Ouest», a-t-elle soutenu.

«Et je pense que ça ne doit pas être une surprise si les mêmes efforts (sont déployés) contre le Canada», a enchaîné l'élue de descendance ukrainienne, qui a été déclarée persona non grata par le régime de Vladimir Poutine en mars 2014.

À sa sortie de la période des questions au Sénat, mardi en fin d'après-midi, Chrystia Freeland a refusé de revenir sur sa déclaration. Elle a quitté les lieux promptement, entourée de membres de son personnel.

Sa collègue Gould n'avait pas voulu revenir sur ces propos non plus. Elle avait néanmoins elle aussi souligné que des alliés clés du Canada avaient essuyé des cyberattaques russes et qu'Ottawa préconisait donc une approche «proactive».

Le premier ministre Justin Trudeau lui a confié la mission de mener une révision des systèmes de cybersécurité fédéraux afin de «défendre le processus électoral du Canada contre les cybermenaces», selon la lettre de mandat qu'il lui a adressée.

La ministre Freeland a été inscrite sur une liste noire par la Russie après qu'Ottawa eut annoncé des sanctions contre Moscou dans la foulée de l'annexion illégale de la Crimée, en même temps que d'autres politiciens fédéraux.

Lundi, elle a évoqué la menace russe lorsqu'on lui a demandé si le Kremlin menait une opération de salissage à son égard - des sites prorusses ont récemment publié des articles présentant son grand-père comme un collaborateur du régime nazi en Allemagne.

La diplomate en chef du Canada venait d'annoncer, en compagnie du ministre de la Défense, Harjit Sajjan, la prolongation de la mission canadienne de renforcement des capacités et d'instruction militaire en Ukraine au moins jusqu'en mars 2019.

L'ingérence de Moscou dans l'élection présidentielle américaine défraie la chronique depuis des semaines.

Le scandale a mené à la démission du Michael Flynn, que le président Donald Trump avait nommé conseiller à la sécurité nationale. Il avait reconnu avoir eu des conversations téléphoniques avec l'ambassadeur de la Russie aux États-Unis durant la période de transition.

La semaine dernière, c'était au tour du secrétaire à la Justice, Jeff Sessions, de se retrouver sur la sellette en raison des contacts qu'il a admis avoir eus avec l'ambassadeur russe pendant la campagne présidentielle.