Ottawa change les règles d'immigration en matière de réunification familiale afin de privilégier le hasard plutôt que la ruse ou l'argent.

Jusqu'à présent, certains Canadiens pouvaient payer des centaines de dollars pour s'assurer que le dossier des proches qu'ils souhaitaient parrainer se retrouve au sommet de la pile évaluée par les fonctionnaires fédéraux.

Mercredi, le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, John McCallum, a annoncé un changement des règles pour 2017. Ceux qui veulent faire venir un parent ou un grand-parent au pays auront 30 jours à compter du 3 janvier pour remplir un simple formulaire en ligne. Le ministère sélectionnera au hasard 10 000 personnes, qui seront alors appelées à envoyer par la poste une trousse de demande complète.

Jusqu'à cette année, le fédéral fonctionnait selon le principe du premier arrivé, premier servi. En conséquence, des demandeurs se prévalaient de coûteux services de courrier, qui gonflaient leur prix pour l'occasion. D'autres faisaient le pied de grue devant l'unique bureau d'immigration qui acceptait les formulaires, à Mississauga, en banlieue de Toronto.

Selon M. McCallum, cette nouvelle façon de faire assurera que «tout le monde aura la même chance».

La semaine dernière, le ministre avait annoncé qu'il prendrait des mesures pour accélérer les demandes de réunifications familiales, et abaisser les délais à 12 mois.

Parrainages privés

Le Canada cherche par ailleurs à exporter son modèle de parrainage privé, un programme grâce auquel 275 000 réfugiés se sont installés au pays depuis la fin des années 1970, selon les chiffres d'Ottawa.

Lorsqu'ils acceptent de parrainer une famille de réfugiés, les citoyens, les organismes humanitaires ou les églises s'engagent normalement à soutenir les nouveaux arrivants pendant une période minimale d'un an. Les répondants doivent payer le loyer et les frais de subsistance, et accompagner les réfugiés dans toutes leurs démarches administratives.

Selon le fédéral, les réfugiés qui sont accueillis selon les paramètres de ce programme s'intègrent plus facilement que ceux qui sont parrainés par le gouvernement.

En conférence de presse mercredi, le ministre McCallum a annoncé que le Canada allait offrir de la formation aux pays souhaitant implanter chez eux un pareil système. L'Allemagne, la Grande-Bretagne, les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, l'Argentine, le Brésil et le Chili auraient déjà levé la main.

«Ce que nous essayons de faire, c'est de vendre notre produit en profitant de cette volonté, dans beaucoup de pays à travers le monde, d'aider ces gens qui ont tant besoin de notre aide», a expliqué M. McCallum.

Présent à la conférence de presse, le représentant au Canada de l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), Johannes Van Der Klauuw, a soutenu qu'il s'agissait d'une avenue qui pouvait porter fruit ailleurs, même s'il ne pouvait préciser combien de réfugiés il aimerait voir s'établir grâce à l'exportation du programme canadien.

«Je ne peux pas vraiment vous donner de cible. Le plus serait le mieux (...), a-t-il noté. C'est un modèle qui fonctionne, peu importe les considérations politiques. Et donc c'est très prometteur de l'essayer dans de nombreux pays.»

Travailleurs temporaires

La veille, le gouvernement fédéral avait annoncé d'autres mesures touchant les dossiers d'immigration, en abolissant la règle de la période cumulative de quatre ans qui s'appliquait aux travailleurs étrangers temporaires au Canada. Cette règle limitait à quatre ans la période de travail de certains travailleurs étrangers, tout en les empêchant de travailler à nouveau au Canada pendant les quatre années suivantes.

Le Conseil du patronat du Québec a salué la décision, se réjouissant plus particulièrement pour le secteur agricole et agroalimentaire qui a grandement recours à ce type de travailleurs.

La porte-parole conservatrice en matière d'immigration, Michelle Rempel, a toutefois déploré cette initiative, en soutenant que le programme de travailleurs temporaires devait être «de dernier recours» et que les Canadiens devaient être «les premiers à obtenir les emplois offerts».