La ministre des Institutions démocratiques, Maryam Monsef, s'est profusément excusée vendredi d'avoir critiqué le travail du comité spécial sur la réforme électorale.

«Hier, dans cette Chambre, j'ai employé des mots que je regrette profondément. (...) J'aimerais présenter mes sincères excuses aux députés de cette Chambre, aux Canadiens et aux membres du comité spécial sur la réforme électorale», a-t-elle déclaré.

La ministre Monsef, qui a présenté ses excuses à trois reprises pendant la période de questions, vendredi, a assuré que «jamais elle n'avait voulu laisser entendre» que les membres du comité n'avaient pas travaillé d'arrache-pied pour remplir leur mandat.

La veille, elle avait provoqué l'indignation des partis d'opposition en accueillant d'un ton dédaigneux le rapport majoritaire du comité multipartite, qui recommandait de proposer un nouveau mode de scrutin proportionnel et de le soumettre ensuite aux Canadiens par référendum.

La ministre avait reproché aux membres du comité d'avoir «abdiqué» au lieu «prendre les décisions difficiles» que l'on attendait d'eux. «Nous avons demandé au comité d'aider à répondre à des questions très difficiles pour nous. Il ne l'a pas fait», avait-t-elle lâché.

Les excuses qu'elle a offertes vendredi en Chambre ont été bien reçues par les partis d'opposition. Mais cet acte de contrition ne règle pas pour autant le problème de fond, ont-ils fait remarquer.

Car selon eux, il semble de plus en plus clair que les libéraux sont en voie de briser leur promesse de «faire en sorte que l'élection de 2015 soit la dernière élection fédérale organisée selon un scrutin majoritaire uninominal à un tour», comme le stipule leur plateforme électorale.

«La question demeure: qu'est-ce que le gouvernement compte faire en ce qui concerne la promesse faite aux Canadiens sur la réforme électorale? Des excuses ne suffisent pas», a fait valoir en point de presse la députée néo-démocrate Niki Ashton.

Et cette campagne de cartes postales qui sera lancée dès lundi pour inviter les Canadiens à participer à un sondage en ligne n'est rien d'autre qu'une nouvelle tactique dilatoire déployée par le camp libéral, a accusé l'élue manitobaine.

Le député conservateur Gérard Deltell a abondé dans le même sens, reprochant aux libéraux de Justin Trudeau d'«improviser une histoire de cartes postales juste à la veille de Noël». Si le gouvernement veut consulter, «il y a une solution, la meilleure, c'est le référendum», a-t-il réitéré.

De son côté, le député bloquiste Gabriel Ste-Marie a dit espérer que Maryam Monsef «tiendra compte» des conclusions majoritaires du comité. Mais pour lui, il est clair que les propos tenus jeudi par la ministre envoient le signal que le gouvernement libéral s'apprête à «tabletter le rapport».

Le rapport du comité spécial de 12 députés, où l'opposition était majoritaire, ne se prononce pas sur un modèle précis de représentation proportionnelle.

Le comité, qui a entendu près de 200 experts et des milliers de Canadiens, conclut cependant qu'une majorité «de ceux qui voulaient du changement» était favorable à un système de représentation proportionnelle mixte.

Il a recommandé que le nouveau mode de scrutin ne dépasse pas cinq sur l'indice de Gallagher, formule mesurant la disproportion entre les votes reçus et les sièges obtenus. C'est cette équation qu'a brandie la ministre en Chambre, puis en point de presse, jeudi, pour tourner en dérision le travail du comité.

Plus l'indice de Gallagher est bas, plus le mode de scrutin est considéré comme représentatif de la volonté populaire. Le mode de scrutin actuel au Canada, dans lequel le parti au pouvoir rafle régulièrement plus de 50 pour cent des sièges aux Communes avec moins de 40 pour cent des suffrages exprimés, obtient un 17 sur l'indice de Gallagher.