Le député néodémocrate Alexandre Boulerice, lui-même victime d'un accident de vélo cet été, confirme que son parti déposera dès la rentrée parlementaire un projet de loi privé visant à doter obligatoirement les camions lourds de protections latérales.

Le politicien en a fait l'annonce en marge de la cérémonie du « vélo fantôme » tenue ce matin en l'honneur de la cycliste Justine Charland St-Amour, qui a été tuée dans une collision avec un poids lourd la semaine dernière à l'intersection du boulevard Rosemont et de la rue d'Iberville. La cycliste a été happée lorsque le véhicule a fait un virage à droite.

En janvier, le coroner Jean Brochu a notamment recommandé l'installation obligatoire de protections latérales sur les camions - aussi appelées « jupettes » - dans son rapport sur le décès de Salim Aoudia, tué également par un camion à l'intersection des rues Nazareth et Wellington en 2014. Un rapport préliminaire du Conseil national de recherches du Canada datant de 2010 a notamment souligné leur efficacité dans trois types de collision impliquant vélos et camions.

M. Boulerice a dit espérer obtenir l'appui des députés libéraux pour faire adopter ce projet de loi privé, dont des moutures semblables sont mortes au feuilleton trois fois par le passé, faute d'appui du gouvernement. « On espère que les libéraux collaboreront cette fois-ci. Ce n'est pas quelque chose d'excessif que nous demandons, d'autant que plusieurs coroners en ont fait la recommandation dans des rapports », a-t-il expliqué.

Ces protections latérales, qui empêchent les cyclistes et piétons de se retrouver sous les roues des camions lors de collisions, coûteraient environ 1095 $ à acheter et installer, selon un rapport du ministère américain des Transports. Sur la base d'un recensement de 80 collisions entre des camions et des « usagers vulnérables de la route », Transports Canada estime toutefois ne pas avoir « trouvé suffisamment de preuves pour adopter des règles mettant en place des exigences d'installation de protections latérales », a affirmé une porte-parole dans un récent entretien avec La Presse.

photo Patrick Sanfaçon, La Presse

Une foule de plus d'une centaine de personnes est venue assister à l'installation d'un mémorial en l'honneur de la cycliste Justine Charland St-Amour.

Un accident de vélo qui a failli coûter la vie à Alexandre Boulerice

Visiblement ému par la cérémonie tenue en l'honneur de Justine Charland St-Amour, M. Boulerice a expliqué à La Presse avoir lui-même failli y passer cet été, lorsqu'il a été percuté à vélo par une voiture à la sortie du parc Lafontaine, au sud de la rue Sherbrooke. « Je me rendais à une vigie dans le Village gai à la suite de la tuerie d'Orlando. Je pense que l'automobiliste a été aveuglé par le soleil ; il n'a rien vu. » M. Boulerice a roulé sur le capot de la voiture et s'en est tiré sans trop de dommages. « Le vélo était bon pour la ferraille », a-t-il toutefois expliqué.

Le député se trouvait ce matin parmi une foule de plus d'une centaine de personnes venues assister à l'installation d'un mémorial en l'honneur de la cycliste Justine Charland St-Amour. Le vélo de cette dernière, tordu et écorché par l'accident, a été tout peint de blanc et attaché de façon permanente à un poteau à l'intersection de la rue d'Iberville et du boulevard Rosemont.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Alexandre Boulerice est rapidement devenu un membre influent du NPD après avoir été élu à la Chambre des communes en 2011 avec la vague orange.

Pour plusieurs participants à la cérémonie, la solution pour une meilleure sécurité à vélo passe entre autres par l'obligation d'installer de telles protections latérales sur les camions, mais aussi par des infrastructures mieux adaptées. « La mort de Justine nous rappelle l'absolue nécessité de mieux réaménager la ville en fonction des cyclistes, a déclaré une des organisatrices de l'événement, Gabrielle Anctil. Aucune de ces collisions n'était un accident. Elles auraient toutes pu être évitées. »

« On interpelle les politiciens parce que malheureusement, les choses ne changent pas suffisamment rapidement, a pour sa part déclaré Mathieu Séguin, de la Coalition vélo de Montréal. Il faut que la ville de Montréal cesse de refaire des artères sans penser à la place des cyclistes. »

Le vélo fantôme installé en l'honneur de Justine Charland St-Amour est le sixième monument commémoratif du genre placé de façon permanente dans les rues de Montréal à la suite de décès de cyclistes. Les organisateurs ont obtenu l'aval des responsables de la ville de Montréal pour le faire.

Les vélos fantôme installés en l'honneur de Mathilde Blais, décédée en 2014 sous le viaduc St-Denis, et de Bernard Carignan, mort l'an passé à la suite d'un emportièrage survenu rue St-Denis, près de Jean-Talon, sont toujours en place plus d'un an après leur installation.

photo Patrick Sanfaçon, La Presse