Le gouvernement de Justin Trudeau a déposé mercredi un projet de loi qui permettrait de surveiller les allées et venues de présumés terroristes ou fugitifs et d'identifier les étrangers qui demeurent au Canada après l'expiration de leur visa, mais aussi d'éviter le versement de prestations à des Canadiens qui n'y ont pas droit.

En vertu de l'entente sur le périmètre de sécurité conclue en décembre 2011, le Canada et les États-Unis avaient convenu de mettre en place un système coordonné d'échanges de renseignements sur l'arrivée et le départ des voyageurs à leurs frontières respectives.

Pour l'instant, les deux pays n'échangent que des données biographiques de base (la page deux du passeport) lors des arrivées et départs aux frontières terrestres. De plus, les deux premières phases de l'Initiative sur les entrées et les sorties ne concernent que le pistage des voyageurs étrangers et des résidants permanents. Et à l'heure actuelle, le gouvernement recueille les données biographiques de tous les voyageurs qui entrent au pays «mais ne dispose pas de moyen fiable» de connaître la date de leur départ, ni d'où ils ont quitté le pays.

Lors de la visite du premier ministre canadien à Washington, le 10 mars dernier, Justin Trudeau et le président Barack Obama ont annoncé que les deux pays mettraient pleinement en oeuvre un système permettant le partage des données biographiques de base sur les entrées et les sorties de tous les voyageurs aux postes-frontières terrestres - y compris, donc, les citoyens canadiens. Le Canada conserverait ces renseignements personnels pendant 15 ans.

Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Ralph Goodale, a présenté mercredi un projet de loi qui permettra à l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) «de recueillir les données biographiques courantes sur tous les voyageurs à leur sortie du Canada». Lorsque le projet de loi sera adopté, le Canada saura à quel moment et à quel endroit une personne est entrée au pays, et à partir de quel moment et de quel endroit elle a quitté le pays.

«Le Canada veillera à ce que des mesures de sécurité efficaces soient mises en place qui assureront la sécurité des Canadiens et la protection de leurs droits et libertés, sans nuire à la circulation vitale des voyageurs et des marchandises en règle à la frontière», indique l'ASFC.

De plus, le Canada prévoit imiter les Américains et colliger aussi ces mêmes renseignements éventuellement aux aéroports, en obligeant les transporteurs aériens à fournir toutes leurs listes de passagers en partance pour l'étranger.

Le gouvernement canadien estime que cette démarche permettra notamment à l'ASFC et à ses partenaires fédéraux de:

- réagir à la sortie de voyageurs et de marchandises à risque élevé connu avant leur départ du Canada par avion (fugitifs, délinquants sexuels inscrits, trafiquants de drogue, passeurs de clandestins);

- intervenir plus efficacement dans les situations nécessitant une réaction rapide comme les alertes Amber;

- vérifier si les candidats à la résidence permanente ou à la citoyenneté ont respecté les exigences de résidence;

- vérifier les dates de déplacement pour déterminer l'admissibilité aux programmes d'avantages sociaux.

Des notes de service de l'Agence de revenu du Canada et du ministère de l'Emploi et du Développement social, obtenues l'an dernier grâce à la Loi sur l'accès à l'information, estimaient que le gouvernement épargnerait entre 194 et 319 millions $ en cinq ans une fois le système entièrement mis en place.

Les autorités fédérales tentent actuellement de se conformer aux recommandations du commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Daniel Therrien, qui prévient que ces renseignements personnels doivent être correctement colligés, utilisés et partagés.