Des mesures de prévention du tabagisme comme la neutralité des emballages pourraient s'appliquer à la marijuana lorsque sa vente sera légalisée, a déclaré mardi la ministre fédérale de la Santé, Jane Philpott.

Mme Philpott a fait cette déclaration à Ottawa au moment d'annoncer le lancement d'une consultation publique au sujet de l'implantation du paquet neutre de cigarettes et autres produits du tabac au Canada, à l'occasion de la Journée mondiale sans tabac. Cette consultation aidera le gouvernement fédéral à élaborer sa réglementation.

L'Australie et plus récemment la France, le Royaume-Uni et l'Irlande ont imposé la neutralité des paquets et le Parti libéral du Canada a promis en campagne électorale de leur emboîter le pas.

Ottawa a déjà annoncé qu'il pourrait s'inspirer de l'Australie, dont les règles sont les plus restrictives. En plus d'imposer une couleur et une typographie uniformes pour la portion de 25 % des paquets qui n'est pas déjà occupée par des mises en garde de santé, le pays impose aussi une forme standardisée.

La ministre Philpott a précisé que le gouvernement examinera aussi la possibilité d'imposer une forme standardisée aux cigarettes elles-mêmes afin de contrer l'attrait que pourraient avoir des cigarettes plus longues et fines pour les adolescentes, par exemple.

Quant à la marijuana, « Nous espérons utiliser beaucoup des choses que nous avons apprises avec le tabac et l'alcool quand viendra le temps de distribuer de la marijuana », a-t-elle déclaré.

Elle a précisé qu'on peut « être assez confiants qu'il y aura des restrictions sérieuses à l'égard du marketing », de même que des campagnes d'éducation publique.

« Les leçons pour s'assurer qu'il n'y a pas d'incitation et de matériel promotionnel associé à la marijuana qui pourrait ouvrir la porte pour une dépendance potentielle à quelqu'un seront des questions qui seront prises en considération », a ajouté la ministre.

Poursuites et «pente glissante»

Au fil des ans, le Canada et d'autres pays ont introduit une série de mesures pour lutter contre la consommation de tabac, incluant les mises en garde de plus en plus importantes sur les paquets de cigarettes et l'interdiction de faire de la publicité et des commandites d'événements sportifs.

Les compagnies de tabac ont contesté ces mesures de manière constante devant les tribunaux et ont promis de faire de même avec le paquet neutre, comme elles l'ont fait ailleurs dans le monde depuis son apparition il y a cinq ans.

Elles affirment qu'il s'agit d'une expropriation illégale de leur droit d'utiliser leurs marques de commerce. Jusqu'ici, leurs arguments ont été rejetés dans les instances nationales et internationales où ils ont été présentés. Une plainte est toujours active devant l'Organisation mondiale de commerce contre la loi australienne adoptée en 2011.

La ministre Philpott a indiqué que les coûts associés à ces poursuites et à l'imposition du paquet neutre et standardisé au Canada sont justifiés aux yeux du gouvernement fédéral, compte tenu de l'efficacité de la mesure du point de vie de la protection de la santé publique et des coûts de 4,4 milliards de dollars liés au tabagisme par année au pays. Cette efficacité est aussi contestée par les compagnies de tabac.

Mme Philpott n'a finalement pas exclu d'étendre une telle mesure à d'autres domaines, comme la malbouffe par exemple. Des opposants brandissent cette menace de la « pente glissante », disant qu'une telle « expropriation » de leur propriété intellectuelle pose le danger d'être imposée à trop de produits jugés nuisibles à l'avenir, qu'ils soient trop sucrés ou trop salés au goût du gouvernement. De telles craintes ont notamment été exprimées par la Fédération des chambres de commerce du Québec.

« Je ne suis pas certaine que j'utiliserais le terme "pente glissante", a-t-elle noté. S'il y a des mesures que nous pouvons adopter comme gouvernement pour garder les Canadiens en santé, c'est ma responsabilité. »