Des sénateurs ont bel et bien contrevenu aux règles en réclamant certaines dépenses aux contribuables, conclut un rapport d'arbitrage rendu public lundi.

Le juge à la retraite Ian Binnie estime qu'un peu plus de la moitié des dépenses en litige, soit 178 000 dollars, n'auraient pas dû être remboursées par la Chambre haute.

M. Binnie a été chargé de trancher après qu'un rapport du vérificateur général du Canada l'an dernier eut soulevé le caractère inapproprié de certaines de ces réclamations.

Les sénateurs qui étaient en désaccord avec ces conclusions du vérificateur pouvaient soumettre leurs doléances à l'ex-juge Binnie. Quatorze sénateurs ont pris part à ce processus d'arbitrage, pour des dépenses totalisant 323 000 dollars.

Deux de ces 14 sénateurs sont du Québec : Pierre-Hugues Boisvenu et Jean-Guy Dagenais. M. Boisvenu devra rembourser le tiers des frais réclamés, soit 20 000 sur 60 000 $. Pour M. Dagenais, la facture s'élève à 2300 sur 3500 $. Dans le cas du sénateur Boisvenu, il n'aurait pas dû déclarer que sa résidence principale était à Sherbrooke pendant une partie de la période visée, a tranché M. Binnie.

En conférence de presse, il a confié que c'est le dossier du sénateur Colin Kenny qui l'avait le plus marqué. M. Kenny a réclamé des milliers de dollars pour parcourir le pays à des fins de réseautage. « C'est une question de disproportion », a-t-il déclaré.

M. Kenny ferait partie d'un groupe de six sénateurs qui font toujours l'objet d'une enquête de la GRC en raison de ces dépenses, selon le Globe and Mail.  

L'étude du vérificateur général Michael Ferguson a été menée dans la foulée du scandale des dépenses au Sénat, qui a engendré des accusations criminelles contre certains d'entre eux, dont Mike Duffy.

M. Ferguson a passé au peigne fin les dépenses de 116 sénateurs entre avril 2011 et mars 2013. Il a relevé environ un million de dollars en dépenses qui lui ont paru inappropriées, de la part de 30 sénateurs. Il a de plus recommandé de transmettre les dossiers de neuf d'entre eux à la GRC. Le corps policier aurait exonéré par écrit 24 de ces 30 parlementaires.

Ian Binnie a noté dans son rapport que les règles permettent un large éventail d'interprétations. « Je n'impute aucune mauvaise intention à qui que ce soit, a-t-il écrit. Les sénateurs ont agi selon ce à quoi ils croyaient avoir droit. Notre désaccord, lorsqu'il y a désaccord, porte sur la teneur de ce droit. »

En conférence de presse, il a précisé que son mandat n'était pas d'évaluer l'intention criminelle des personnes concernées, mais plutôt le simple respect des règles du Sénat.