À six mois des élections fédérales, une première bataille oppose déjà un parti politique aux réseaux de télévision qui diffusent les débats télévisés en campagne électorale.

Le nouveau parti Forces et démocratie, créé par l'ex-bloquiste Jean-François Fortin, ne serait pas bienvenu à l'événement.

«Après plusieurs jours d'hésitations et d'incertitude, leur verdict est tombé hier (mercredi): ils veulent exclure Forces et démocratie des débats», s'est-il désolé en conférence de presse à Ottawa, jeudi.

M. Fortin reproche au consortium des médias d'avoir accouché d'un nouveau critère voulant que seuls les partis ayant fait élire un député sous leur bannière aux dernières élections peuvent participer aux débats.

En 2008, la chef du Parti vert du Canada, Elizabeth May, avait été invitée à prendre part à la joute oratoire alors qu'elle n'avait fait élire aucun député à l'élection précédente, a-t-il fait remarquer.

«Elle avait pu être du débat compte tenu du fait qu'un député indépendant s'était joint aux verts quelques jours avant le déclenchement (des élections)», a rappelé Jean-François Fortin.

Il estime ainsi que la position du consortium des médias est «indéfendable» et juge que ce type de critère «serait un frein sévère à l'émergence de toute nouvelle voix en politique».

Du côté du consortium, on ne veut pas réagir directement à ces affirmations.

«À ce stade-ci, aucune décision finale n'a été prise. Il y a une rencontre demain (vendredi) pour en discuter», a déclaré à La Presse Canadienne une porte-parole du groupe de télédiffuseurs composé de Radio-Canada, CBC, CTV News et Shaw Media.

Jean-François Fortin espère que les représentants des autres partis profiteront de cette rencontre pour plaider en faveur de sa participation.

En conférence de presse, il a soutenu que trois chefs - le libéral Justin Trudeau, le bloquiste Mario Beaulieu et la verte Elizabeth May - lui avaient offert leur appui.

Le dirigeant néo-démocrate Thomas Mulcair a ajouté officiellement sa voix à ce concert d'appuis, jeudi après-midi.

«Je pense que tous les partis avec deux membres devraient pouvoir participer à toutes sortes d'événements, y compris des débats éventuels», a-t-il résumé en point de presse au foyer des Communes.

Du côté du regroupement de télédiffuseurs, on assure que le son de cloche des autres formations est pris en considération dans les discussions, comme cela «a toujours été le cas dans le passé», mais que «la décision ultime revient» au consortium.

Si la balance penchait en faveur de la présence du chef de Forces et démocratie, le débat se ferait à six chefs, en incluant évidemment le premier ministre sortant Stephen Harper.

La présence d'un aussi grand nombre de joueurs ne devrait pas être facteur d'exclusion sous prétexte que cela pourrait mener à une cacophonie, selon Jean-François Fortin.

«Je crois qu'en démocratie, on ne doit pas fermer le discours ou ne pas permettre une voix qui pourrait être intéressante pour la population» sur cette base-là, «sinon, on ne favorise que les idées dominantes à chaque fois», a déclaré le chef du parti régionaliste.

«Je crois qu'il est peut-être temps de réfléchir à des nouvelles formules, a-t-il soutenu. On parle de six personnes autour de la table, pas de 20.»

M. Fortin a créé Forces et démocratie après avoir abandonné le Bloc québécois à l'arrivée de Mario Beaulieu. Son parti compte deux députés aux Communes: lui-même et l'ex-néo-démocrate Jean-François Larose.

Le parti est reconnu par Élections Canada et se promet de présenter des candidats dans toutes les circonscriptions du Québec, cet automne.

Environ une dizaine de candidats se lanceront prochainement dans la course de façon officielle sous la bannière de Forces et démocratie, qui compte près de 5000 membres jusqu'à présent, selon le parti.

Les députés Fortin et Larose se présenteront vendredi à la réunion du consortium des médias à Toronto, sans invitation, pour défendre leur point de vue.