Les déménagements du personnel diplomatique canadien en poste à l'étranger ont coûté en moyenne 37 millions de dollars par année aux contribuables, au cours des cinq dernières années. C'est ce que révèlent des données obtenues par La Presse en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

Quelque 2100 employés canadiens étaient en affectation à l'étranger en date du 31 mars 2013, la plus récente statistique disponible. L'an dernier, 912 d'entre eux ont déménagé, ce qui a coûté 36,1 millions au Trésor public, soit une moyenne de 39 540$ par déménagement.

Le ministère des Affaires étrangères a refusé la demande d'entrevue de La Presse, mais a précisé par courriel que la durée des mandats du personnel diplomatique varie de un à cinq ans. Les coûts de déménagement incluent non seulement l'expédition des marchandises, mais aussi les frais reliés au déplacement des employés et de leur famille, s'il y a lieu.

Les données obtenues par La Presse couvrent les cinq dernières années, ce qui permet de constater que le coût moyen de chaque déménagement est passé de 35 479$ en 2009-2010 à 39 540$ en 2013-2014. «Nous ne pouvons pas confirmer l'augmentation systématique des coûts de déménagements dans les dernières années», écrit le porte-parole François Lasalle.

Aucune somme maximale n'est prévue pour les frais de déménagement, qui sont effectués par des entreprises privées. En revanche, le poids autorisé est strictement encadré. Par exemple, une personne seule qui occupe un logement non meublé a droit à 4700 kg, ce à quoi il faut ajouter le poids de sa voiture, si son déménagement est autorisé.

Le responsable d'une entreprise de déménagement international contacté par La Presse a qualifié «d'énorme» le coût moyen des déménagements des diplomates canadiens. Selon ce professionnel, qui préfère ne pas être identifié, ces montants ne peuvent  pas être attribués à un manque de concurrence, car elle est vive dans ce secteur d'activité.

Il explique par contre que les déménagements de diplomates ou de militaires suivent souvent des «itinéraires inusités», ce qui fait augmenter leur coût. «De Kaboul à l'Ouganda, ça va transiter par plusieurs pays, dont des zones à risque», illustre-t-il. Inversement, il estime que déménager de Montréal à Paris ne devrait guère coûter plus de 10 000$, pour un couple avec un enfant.

Au final, «c'est le volume qui dicte le prix», dit-il. La destination et la rapidité à laquelle les effets doivent être expédiés ont aussi une incidence. «Le fret maritime vers l'Afrique est très très cher», précise-t-il.

L'opposition n'est pas surprise

Ces données n'étonnent pas la néo-démocrate Hélène Laverdière, qui est porte-parole adjointe de l'opposition en matière d'affaires étrangères et elle-même ancienne diplomate. «Les déménagements de diplomates, souvent, ça peut être très compliqué, explique-t-elle. Il y a des gens qui ont une famille avec plusieurs enfants, c'est un gros truc de déménager une famille d'un endroit à l'autre.»

La députée fédérale de Laurier-Sainte-Marie s'inquiète plutôt du fait que «beaucoup de nouvelles affectations ont été annulées l'été dernier, souvent à la dernière minute» et que des diplomates ont vu leur mandat prolongé «au-delà de la limite normale», se demandant si ces décisions ont été prises pour des raisons budgétaires.

«Les diplomates ont des mandats limités pour de bonnes raisons, poursuit-elle, que ce soit la sécurité, la famille [...] ou pour éviter qu'ils s'intègrent trop à la société étrangère.»

- Avec William Leclerc