Au 30e anniversaire de son historique triomphe électoral à la tête du Parti progressiste-conservateur, Brian Mulroney n'a pas ménagé les critiques à l'endroit de Stephen Harper, déplorant certaines façons de faire de son gouvernement en matière de politiques étrangères de même que la dispute du premier ministre avec la juge en chef du pays.

Lors d'une entrevue accordée au réseau CTV, M. Mulroney a fermement dénoncé M. Harper pour son litige public, cette année, avec Beverley McLachlin, juge en chef de la Cour suprême du Canada.

«Vous ne pouvez pas prendre part à un concours de dénigrement avec la juge en chef de la Cour suprême du Canada, même si vous savez qu'il ou elle a tort», a déclaré M. Mulroney lors de l'entrevue diffusée jeudi.

«Ça ne se fait pas.»

Les critiques de l'ancien premier ministre vis-à-vis l'approche du gouvernement dans d'autres dossiers ont été tout aussi cinglantes, particulièrement en matière d'affaires étrangères ainsi que sur les relations tendues du Parti conservateur avec les Nations unies.

«Lorsque le Canada, pour la première fois de notre histoire, perd un vote aux Nations unies pour devenir membre du Conseil de sécurité... au profit du Portugal, qui était sur le point de faire faillite à l'époque, vous devriez vous regarder dans le miroir et dire : " Houston, je pense que nous avons un problème. "» M. Mulroney a fait remarquer que la politique du gouvernement en matière d'affaires étrangères «doit être enveloppée dans un mouvement plus vaste et plus généreux qui incorpore les traditions canadiennes et l'histoire canadienne d'une façon beaucoup plus viable».

M. Mulroney a également semoncé M. Harper pour ses relations avec le président américain Barack Obama, laissant sous-entendre que le premier ministre canadien n'a pas de liens suffisamment étroits lui permettant d'appeler le Bureau ovale et demander un appui bilatéral dans certains dossiers.

«Si vous ne pouvez faire cela, vous n'avez pas beaucoup de poids sur le plan international. Le premier ministre doit prendre soin des relations avec les États-Unis de la même façon qu'il s'occuperait des fleurs les plus fragiles dans un jardin. C'est important à ce point.»

Même si l'ancien politicien de 75 ans dit appuyer le gouvernement et «ce qu'il tente de faire en général», il a laissé sous-entendre que le chef libéral Justin Trudeau va profiter de ce qu'il pense être une lassitude du public à l'endroit des conservateurs.

«Il est jeune, il paraît bien, il a été élu deux ou trois fois à la Chambre, il a une jolie femme, de beaux enfants - lorsque vous vous présentez dans ces circonstances, il s'agit d'un emballage puissant», a déclaré M. Mulroney en parlant du fils aîné de son ancien rival politique.

M. Mulroney rejette les arguments des observateurs qui accusent M. Trudeau de ne pas offrir de programme politique.

«Son programme est qu'il n'est pas Stephen Harper.»

Et l'ancien premier ministre croit que les conservateurs sous-estiment M. Trudeau.

«Il faut être irréfléchi pour rester assis et ne pas reconnaître que ça ne relève pas du hasard lorsque quelqu'un domine les sondages pendant 14 mois consécutifs», a-t-il lancé lors de l'entrevue, réalisée dans ses bureaux de Montréal.

Le Bureau du premier ministre n'a pas immédiatement réagi aux critiques de M. Mulroney.

L'ancien premier ministre n'a pas fait que critiquer. Non seulement M. Mulroney a maintes fois vanté M. Trudeau, mais il a aussi fait l'éloge du leader du NPD, Thomas Mulcair, le qualifiant de «meilleur chef de l'opposition depuis John Diefenbaker».