Les néo-démocrates disent avoir obtenu l'assurance du gouvernement Harper que le journaliste canado-égyptien Mohamed Fahmy ne perdra pas sa citoyenneté après avoir été reconnu coupable de terrorisme devant un tribunal du Caire.

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Thomas Mulcair, en a fait la demande personnellement dans une lettre envoyée mercredi au bureau du premier ministre Stephen Harper, dont une copie a été fournie à La Presse Canadienne.

Plus tôt dans la journée, M. Harper a affirmé, lors d'une conférence de presse à Roberval, au Québec, que le gouvernement canadien était très inquiet après le verdict de terrorisme et la peine de prison de sept ans infligée à M. Fahmy et à deux autres collègues du réseau Al-Jazira. De son côté, le ministre des Affaires étrangères, John Baird, a indiqué que le gouvernement fédéral allait continuer de faire pression pour obtenir la libération du journaliste.

Malgré tout, le gouvernement a maintenant le pouvoir de révoquer la citoyenneté canadienne de M. Fahmy en vertu de la nouvelle - et controversée - loi sur l'immigration, a noté M. Mulcair dans sa lettre.

Le projet de loi C-24, qui est entré en vigueur la semaine dernière, donne au gouvernement le droit de révoquer la citoyenneté canadienne d'une personne reconnue coupable de crimes tels que la trahison ou le terrorisme.

Bien que la condamnation de M. Fahmy en Égypte ait provoqué la consternation à travers le monde, M. Mulcair a demandé à M. Harper de dire clairement que la citoyenneté canadienne du journaliste ne serait pas révoquée.

Dans la lettre, M. Mulcair a rappelé la vive opposition du NPD au projet de loi C-24, soulignant que des experts ont dit craindre que celui-ci ne contienne des «violations sérieuses» de la Charte canadienne des droits et libertés.

«L'affaire de Mohamed Fahmy en Égypte offre une occasion immédiate de prendre conscience des dangers de cette nouvelle loi», écrit M. Mulcair.

«Pouvez-vous offrir l'assurance qu'il ne sera pas privé de sa citoyenneté canadienne lorsqu'il a besoin, plus que jamais, de l'appui de notre pays?»

Dans un courriel transmis à La Presse Canadienne, le porte-parole de M. Harper, Jason MacDonald, a affirmé: «Nous n'avons pas l'intention de faire cela. Il s'agit d'une théorie de la conspiration avancée par l'opposition. Nous avons défendu M. Fahmy et nous continuerons de le faire à tous les niveaux».

M. Harper a essuyé une pluie de critiques de l'opposition et d'éditorialistes dénonçant son silence, lundi, après la condamnation de Mohamed Fahmy, qui possède la double citoyenneté égyptienne et canadienne.

La justice égyptienne reproche à M. Fahmy et à ses deux collègues d'Al-Jazira, un Égyptien et un Australien, d'avoir offert une plateforme aux Frères musulmans en diffusant des images des manifestations soutenant le président déchu Mohamed Morsi. Le parti de l'ancien président Morsi est maintenant considéré comme un groupe terroriste en Égypte.

M. Fahmy, Peter Greste et Baher Mohamed ont toujours répété qu'ils ne faisaient que leur travail. Et ils ont reçu l'appui de journalistes à travers le monde. Lundi, les gouvernements australien, britannique et néerlandais ont également dénoncé les condamnations, le tribunal égyptien ayant aussi condamné deux journalistes britanniques et une néerlandaise, jugés par contumace.

Pendant ce temps, Ottawa se contentait d'une déclaration écrite, signée par une ministre d'État, qui soulignait «la déception» du Canada.

Mercredi matin, alors qu'il était de passage à Roberval, M. Harper a été invité à expliquer pourquoi son gouvernement n'intervenait pas «plus fermement» dans ce dossier.

«Évidemment, je ne suis pas d'accord avec ça», a d'abord dit le premier ministre, rabrouant la journaliste qui lui avait posé la question.

«Nous avons exprimé nos préoccupations, (...) nous avons donné des services consulaires d'une façon aussi bonne que possible», a-t-il ajouté.

Selon lui, les autorités égyptiennes comprennent bien la position du gouvernement canadien. Il a assuré que cette position continuerait d'être présentée au gouvernement égyptien, mais il a refusé d'en dire plus, même si les journalistes présents à Roberval ont tenté d'insister.

Mardi, répondant aux mêmes critiques, le ministre des Affaires étrangères, John Baird, a affirmé que forcer la main de l'Égypte n'aiderait pas la cause du journaliste canado-égyptien.

Le sort des journalistes emprisonnés au Caire a inspiré une pétition qui circule dans les médias sociaux. Plusieurs journalistes ont aussi diffusé des photos d'eux-mêmes bâillonnés, appelant ainsi au respect de la liberté de presse.

Photo REUTERS

Plusieurs journalistes ont diffusé des photos d'eux-mêmes bâillonnés, appelant ainsi au respect de la liberté de presse. Ici, des employés de la BBC.