Les Québécois doivent reprendre leur place au sein du Canada en cessant de traiter l'anglais comme une langue étrangère et en s'alliant avec d'autres Canadiens qui prônent une fédération moins centralisée, estime le ministre d'État aux petites entreprises, Maxime Bernier.

Ils doivent aussi cesser de «quémander toujours plus d'argent à Ottawa» en adoptant les mesures budgétaires qui s'imposent pour s'attaquer aux problèmes d'endettement qui, à terme, nuisent à la croissance économique du Québec.

Ces messages sans équivoque, le ministre Bernier les livrera ce matin à Montréal dans le cadre d'un discours coup de poing devant le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec. La Presse a obtenu les grandes lignes du discours de M. Bernier, qui se veut un appel à la mobilisation des Québécois dans la foulée des élections provinciales du 7 avril.

Le hasard veut que M. Bernier prononce ce discours le jour de la rentrée parlementaire à Québec, et 34 ans jour pour jour après le premier référendum sur la souveraineté.

Selon M. Bernier, les Québécois ont clairement rejeté l'option souverainiste durant la dernière campagne électorale en administrant une cinglante défaite au Parti québécois et en confiant un mandat majoritaire aux troupes libérales de Philippe Couillard.

«Depuis l'élection, les médias ont consacré beaucoup d'espace à la question de savoir si le Parti québécois a un avenir et comment il pourra de nouveau convaincre les jeunes d'adhérer à son option. Compte tenu du résultat de l'élection, il y a une question bien plus pressante et pertinente à laquelle il faut répondre et qui n'a pratiquement pas fait l'objet d'aucun débat: comment allons-nous, nous les Québécois, reprendre notre place au sein du Canada?», s'interroge le ministre dans son discours.

À cette question, M. Bernier propose une réponse à trois volets: les Québécois doivent d'abord se réconcilier avec leur histoire et leur identité pluraliste; ils doivent cesser de voir le Canada uniquement à travers le prisme d'une association rentable; enfin, ils doivent s'associer avec les Canadiens qui partagent leur vision d'un fédéralisme décentralisé qui respecte les pouvoirs des provinces.

Dans son discours, M. Bernier s'insurge contre les tentatives soutenues de «l'élite nationaliste au Québec» pour «délégitimer» toutes les identités autres que l'identité québécoise francophone «définie de façon exclusive».

Une identité multiple

Certes, il faut demeurer vigilant pour assurer la survie de la langue française en Amérique du Nord.

«En plus de l'héritage français, la langue anglaise, les institutions et les symboles britanniques, puis canadiens, ont façonné ce que nous sommes. Notre identité, ça inclut tout cela. Exactement comme le fait français fait partie de l'identité de tous les Canadiens», poursuit le ministre.

Pour reprendre sa place, M. Bernier croit que le Québec doit briser sa dépendance financière envers Ottawa en misant sur des politiques permettant de créer de la richesse. Il rejette l'idée que le fédéralisme doit être «rentable» pour être apprécié, comme l'affirmait l'ancien premier ministre Robert Bourassa. Le Québec obtiendra cette année 9,3 milliards de dollars en paiement de péréquation. «Si nous sommes plus pauvres, ce n'est pas la faute du reste du Canada, comme le prétendent les indépendantistes. [...] Si nous sommes plus pauvres, c'est à cause de mauvaises politiques économiques qui rendent l'économie du Québec moins productive. C'est parce que le premier réflexe d'une bonne partie de notre classe politique est d'aller quêter plus d'argent à Ottawa au lieu de prendre les décisions qui s'imposent pour régler nos problèmes.»

Enfin, M. Bernier invite les Québécois à reprendre leur place en créant des alliances avec ceux qui partagent leur vision du fédéralisme. «Imaginez le poids et l'influence politique que les Québécois auraient s'ils s'unissaient derrière cette vision autonomiste qui rallie une large majorité chez nous. Imaginez le poids et l'influence politique que les Québécois auraient s'ils s'alliaient aux autres Canadiens qui désirent eux aussi un Canada moins centralisé et moins étatisé.»