Le gouvernement conservateur majoritaire effectue un rare repli d'importance en retirant ou en amendant certains des éléments les plus controversés de son projet de réforme de la loi électorale.

Après deux mois de démonstrations d'intransigeance sur les mérites du projet de loi C-23, le ministre d'État à la Réforme démocratique, Pierre Poilievre, a fait état des changements apportés lors d'une annonce surprise, vendredi après-midi.

«J'estime qu'il s'agit d'un excellent projet de loi», a dit le ministre à la partisanerie irrépressible, lors d'une conférence de presse d'abord convoquée pour réagir à la décision de la Cour suprême sur le projet de réforme du Sénat.

«Tel quel, le projet de loi est formidable, et les amendements l'amélioreront encore davantage», a-t-il poursuivi.

C'est de cette manière que M. Poilievre a présenté l'abandon de plusieurs éléments majeurs d'une vaste proposition de réforme critiquée de toutes parts, notamment par l'actuel Directeur général des élections et des experts des élections du Canada et de l'étranger.

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Thomas Mulcair, a qualifié le projet de loi d'«erreur monumentale» qui nécessiterait encore beaucoup de travail, disant croire que M. Poilievre avait finalement «jeté un peu de lest».

Le porte-parole du NPD en matière de réforme démocratique, Craig Scott, a dit attendre de voir de quelle manière seront explicités les amendements, qui ont été soumis à un comité des Communes étudiant le projet de loi C-23.

«On ne devrait pas se mettre à chanter Kumbaya», a exprimé M. Scott, en faisant référence à une chanson traditionnelle exprimant un optimisme naïf. Il a évoqué un grand nombre de lacunes dans le projet de loi.

«Mais il s'agit là de l'une des plus importantes victoires qu'il est possible d'observer dans une situation de gouvernement majoritaire», a-t-il poursuivi, saluant l'impact d'une opposition à grande échelle.

Même certains députés conservateurs ont exprimé discrètement leur grogne à l'égard de la «sourde oreille» du jeune ministre, pour reprendre les termes de l'un d'entre eux ne souhaitant pas critiquer publiquement son collègue du caucus.

Alors que la Chambre des communes doit reprendre ses activités lundi, après une pause de Pâques de deux semaines, M. Poilievre a profité de la décision historique de la Cour suprême sur la réforme du Sénat, vendredi, pour annoncer ces changements au projet de loi sur la réforme électorale.

Le ministre a affirmé que son gouvernement était ainsi prêt à retirer l'obligation pour tous les électeurs de montrer à l'avenir une preuve de résidence au bureau de scrutin. M. Poilievre a indiqué que les citoyens seraient alors en mesure de signer une déclaration sous serment attestant de leur lieu de résidence, tout en devant encore fournir une quelconque preuve de leur identité.

Une disposition qui aurait ouvert la voie à des nominations partisanes de directeurs de bureaux de scrutin est aussi abandonnée, de même qu'une disposition restreignant les communications publiques du Directeur général des élections.

Le gouvernement abandonne aussi une mesure qui aurait permis aux partis de solliciter, durant une campagne, d'anciens donateurs sans avoir à déclarer cette sollicitation comme une dépense électorale en vertu de la loi.