Convaincu que Stephen Harper sera tenté de prendre les partis de l'opposition de vitesse en déclenchant un scrutin hâtif, le chef du NPD Thomas Mulcair demande à ses troupes d'être fin prêtes pour des élections générales en 2014.

En principe, les prochaines élections devraient avoir lieu le troisième lundi d'octobre en 2015, si M. Harper respecte la Loi sur les élections à date fixe que son gouvernement a fait adopter en 2007.

Mais M. Mulcair ne fait nullement confiance au premier ministre pour respecter cette loi puisqu'il l'a déjà enfreinte en septembre 2008 quand il a demandé au gouverneur général de dissoudre le Parlement alors qu'il dirigeait un gouvernement minoritaire.

Dans une entrevue à La Presse, hier, M. Mulcair a aussi affirmé que M. Harper a fait fi d'autres promesses dans le passé, notamment celle de créer une commission des nominations au sein de l'appareil fédéral.

«2014 sera une année charnière. Nous sommes dans le dernier droit avant les prochaines élections», a affirmé le chef de l'opposition officielle.

«Le problème avec Stephen Harper, c'est que malheureusement, il ne respecte jamais la parole donnée. [...] Nous allons être prêts dès 2014 à toutes les éventualités. La machine est déjà en train de se mettre en branle. On a des équipes sur le terrain. J'ai déjà mon premier comité. On ne tient rien pour acquis. On ne veut courir aucun risque. Ce serait irresponsable», a-t-il ajouté.

Il a souligné que M. Harper entreprendra en juin la quatrième année de son mandat majoritaire et que Jean Chrétien avait joué ce même tour aux conservateurs en 1997 et en 2000 en déclenchant des élections après trois ans et demi pour maximiser ses chances de réélection.

Une opposition redoutable

Fort d'une performance à la Chambre des communes qui a été bien accueillie par les analystes de la presse anglophone dans la foulée du scandale des dépenses au Sénat, M. Mulcair a affirmé que son parti a pu démontrer qu'il forme une redoutable opposition capable de remplacer les conservateurs.

Il reste tout de même un défi de taille à relever: mettre fin au réflexe naturel des électeurs de remettre les clés du pouvoir à l'un des deux autres partis quand ils se lassent de celui qui est au pouvoir en levant le nez sur le NPD.

«La question est de savoir si on est capables de rompre avec cette habitude d'alterner entre la corruption libérale et la corruption conservatrice. Je pense que les gens nous regardent comme une option viable. Et c'est le travail qui reste à accomplir d'ici les prochaines élections», a-t-il soutenu.

«Il faut aller convaincre des gens qui peuvent avoir le réflexe de dire "on alterne entre les libéraux et les conservateurs depuis la Confédération" et il faut s'interposer en leur disant: "Un instant, vous méritez mieux que ça. Le seul intérêt qui va dicter nos choix, c'est l'intérêt public"», a-t-il ajouté.

En entrevue, M. Mulcair a fait valoir que le NPD se retrouve dans une position concurrentielle, même si les sondages nationaux placent les libéraux de Justin Trudeau en tête dans les intentions de vote depuis six mois. «Nous n'avons jamais été dans une meilleure posture à travers le Canada à deux ans d'une élection générale. Ce qui était auparavant notre plafond est devenu notre plancher. On est dans les 25, 26% à travers le Canada d'une manière constante. Donc, ça augure très bien pour nous. La fondation est coulée. Le béton est en train de prendre. Maintenant, il nous reste à bâtir là-dessus», a-t-il imagé.

Une équipe solide

Il a aussi soutenu qu'il peut compter sur une équipe d'une centaine de députés qui ont fait leur marque depuis leur élection en 2011. Les Alexandre Boulerice, Françoise Boivin, Guy Caron et compagnie ont démontré, selon lui, qu'ils sont capables de tenir tête aux ministres conservateurs.

Il a tenu à vanter son équipe de jeunes proches collaborateurs qui l'ont épaulé alors qu'il menait un interrogatoire serré du premier ministre sur le scandale des dépenses au Sénat.

«Nous sommes en train d'atteindre une vitesse de croisière en tant qu'opposition officielle. On sent que Stephen Harper est un petit peu déstabilisé, a-t-il dit. C'est la première fois depuis qu'il est en poste que Stephen Harper fait face à une opposition officielle non seulement robuste et solide, mais j'oserais même dire coriace. On ne s'en laisse pas imposer.»