«Soyez le premier ministre pour lequel nous avons voté, évincez Duffy du Sénat et excusez-vous aux Canadiens.»

Des centaines de Canadiens, dont plusieurs partisans conservateurs, ont pris la plume en mai pour exprimer leur colère au premier ministre Stephen Harper concernant le scandale qui ébranle son gouvernement depuis un an.

La Presse a obtenu plus de 250 pages de courriels envoyés à M. Harper entre le 12 et le 22 mai, soit au coeur du scandale. C'est durant cette période que Mike Duffy et Pamela Wallin ont quitté le caucus conservateur. Le chef de cabinet de M. Harper, Nigel Wright, a admis avoir payé Mike Duffy et a aussi quitté son poste, le 19 mai.

J'espère que toute cette histoire n'est pas vraie, a écrit un partisan conservateur, «parce que si ce l'est, ne me demandez plus de donner de l'argent au Parti conservateur».

Plus de 7000 pages

Notre demande initiale visait tout type de correspondance reçue par le bureau de M. Harper sur le sujet entre le 1er avril et le 22 mai. Le gouvernement a répondu en disant qu'il y avait près de 7000 pages et que leur divulgation engendrerait des frais et des délais considérables. Nous l'avons donc limitée aux seuls échanges de courriels, pour une période plus courte.

Bon nombre de ces courriels portent la mention «langage inapproprié». La cible des critiques est tantôt Mike Duffy, tantôt le gouvernement ou le premier ministre, et parfois le Sénat lui-même. L'identité des auteurs, comme de longues portions de leurs messages, a été cachée.

Plusieurs y sont allés de commentaires empreints de sarcasme en évoquant le chèque de Nigel Wright: «Pouvez-vous me dire s'il est approprié pour le bureau du premier ministre de payer la dette de Mike Duffy? J'ai des dettes. Est-ce que le bureau du premier ministre peut les payer pour moi?», a écrit l'un d'eux.

D'autres ont remis en question la position du premier ministre voulant qu'il n'était pas au courant du paiement de M. Wright à M. Duffy.

«Réalisez-vous à quel point vous n'êtes pas crédible quand vous défendez la débâcle du Sénat/bureau du premier ministre comme une tentative de sauver des fonds publics??!! Croyez-vous vraiment que nous sommes aussi stupides? Il n'y a AUCUNE chance que Harper n'était pas au courant de la tentative de Nigel Wright de sauver Duffy», a écrit l'un d'eux.

M. Harper prétendait à l'époque qu'il avait accepté la «démission» de M. Wright avec «beaucoup de regrets» et qu'il croyait que ce dernier avait agi «dans l'intérêt public». Il laisse maintenant entendre que son ancien bras droit l'a trahi et qu'il l'a congédié.

À peine quelques courriels défendent M. Wright, dont un, assez long et hautement censuré. «Je vous demande, conservateurs, libéraux et NPD, de faire la bonne chose et de restaurer la réputation [...] de M. Nigel Wright», peut-on lire dans l'une des seules portions divulguées. On ignore qui l'a envoyé.

- Avec William Leclerc