En contournant les règles de l'appel d'offres public pour remplacer le pont Champlain en décrépitude, le gouvernement du Canada risque d'entraîner le projet sur le terrain glissant du «favoritisme», croit le chef du NPD, Thomas Mulcair.

«Le risque réel, c'est que le public paie trop cher. Il y a un risque évident que, si on ne va pas au plus bas soumissionnaire conforme, on est en train d'utiliser des critères autres que des critères d'administration publique, c'est-à-dire qu'il y aura du favoritisme et c'est un gros problème», a commenté hier M. Mulcair. Selon lui, il semble évident que le gouvernement «ne retient jamais les leçons de l'histoire», y compris l'impact des récents scandales dans le domaine de l'ingénierie.

M. Mulcair réagissait aux révélations de La Presse selon lesquelles le gouvernement a décidé de faire fi des habituelles règles de concurrence pour octroyer, de gré à gré, un contrat d'ingénierie de 15,2 millions à ARUP.

Interpellé en Chambre, le ministre des Transports, Denis Lebel, a affirmé que le choix d'ARUP est justifié, étant donné que «la firme en question est associée au dossier du pont depuis déjà un bon moment». «Ce sont des gens qui sont résolument au travail», a ajouté M. Lebel.

À Travaux publics, qui est responsable de l'attribution du contrat «en source unique», on précise qu'un processus concurrentiel aurait eu des «répercussions négatives sur les activités du Ministère». Ce serait donc l'intérêt public qui commandait d'agir ainsi, explique-t-on.

ARUP est une firme de génie-conseil d'origine britannique, nouvellement installée à Montréal. Elle a participé à un précédent contrat aux côtés de PricewaterhouseCoopers afin de préparer le dossier d'affaires de partenariat public-privé qui est le mode de réalisation choisi par Ottawa pour remplacer le pont Champlain.

Le ministre Lebel a également été invité à répondre sur le rejet du péage, à 61%, de la part des résidants de la région de Montréal, que démontre un sondage CROP mené pour La Presse. Pour la énième fois, Denis Lebel a dit que sans péage, il n'y aurait pas de pont, et surtout, que cela ne constituait pas une surprise. «Nous allons continuer à faire en sorte que le pont qui sera bâti répondra aux besoins de la grande région de Montréal, avec la capacité de payer des payeurs de taxes canadiens», a-t-il affirmé.