Plusieurs voix du monde des affaires se félicitent du projet de loi sur les budgets équilibrés annoncé dans le discours du Trône, mercredi, alors que des organisations syndicales estiment que des enjeux plus pressants auraient dû surpasser le «dogme» de l'équilibre.

Le Conseil du patronat du Québec se réjouit du dépôt prévu d'un projet de loi qui exigera l'adoption de budgets équilibrés, ainsi que de l'engagement renouvelé envers l'équilibre budgétaire en 2015-2016.

L'organisation salue aussi dans le discours du Trône, lu mercredi à la Chambre des communes, la volonté du gouvernement d'assurer un contrôle serré de ses dépenses.

Le Conseil du patronat dit constater également l'intention de favoriser la croissance économique par le soutien à la création d'emplois par le secteur privé et le maintien d'une «fiscalité globale concurrentielle» à l'échelle internationale.

Tout en saluant l'intention du gouvernement d'agir pour pallier les conséquences des accidents majeurs ou des désastres naturels, le Conseil affirme «s'interroger sur les modalités» qui caractériseront le Programme national d'atténuation des catastrophes.

Il souhaite par ailleurs que l'introduction d'exigences en matière d'assurance-responsabilité fasse l'objet de discussions entre les parties concernées.

Concernant la protection des consommateurs, le Conseil du patronat estime que les mesures adoptées devraient «reconnaître la réalité» des grandes entreprises qui contribuent au «bien-être économique» de la population canadienne et ne pas nuire à leur compétitivité. Il appelle aussi sur cet enjeu à des «échanges constructifs» entre toutes les parties.

«Il s'agit de points d'interrogation. Nos membres sont certainement d'accord pour faire en sorte que les consommateurs et les citoyens soient mieux protégés. C'est le rôle du gouvernement. D'emblée, nos membres sont favorables à ces idées-là. Le diable est dans les détails. Cela va dépendre du dialogue qui va s'établir entre les industries et les secteurs touchés et le gouvernement pour ce que ceux-ci demeurent compétitifs», a évoqué en entrevue téléphonique le président du Conseil du patronat du Québec, Yves-Thomas Dorval.

La Fédération canadienne des contribuables (FCC) applaudit aussi de son côté la promesse du gouvernement conservateur d'une législation pour garantir des budgets équilibrés.

L'organisation parle du «signal le plus fort» en ce sens depuis que Stephen Harper est devenu premier ministre.

La FCC, groupe de défense qui ne se dit affilié à aucun organisme privé ou politique, appelle tous les partis politiques à soutenir une loi musclée sur l'équilibre budgétaire qui obligerait les gouvernements à rendre des comptes à l'avenir.

Selon la Fédération, le gouvernement conservateur se doit désormais de respecter sa promesse d'un excédent budgétaire en 2015 s'il ne veut pas se commettre dans un «suicide politique».

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI) dit croire que le gouvernement fédéral «a entendu les préoccupations des entrepreneurs canadiens en annonçant son intention d'adopter une législation en matière d'équilibre budgétaire et de réduire les impôts des petites entreprises».

La CSQ évoque de multiples déceptions

La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) parle pour sa part d'une «occasion ratée de s'attaquer aux problèmes les plus urgents auxquels fait face le Canada».

La CSQ cite ainsi ses déceptions à l'égard de l'environnement, l'assurance-emploi, la formation de la main-d'oeuvre et les questions autochtones.

Concernant l'environnement, l'organisation syndicale estime que la volonté du gouvernement d'enchâsser dans la loi le principe de pollueur-payeur n'est pas suffisante. Elle souhaite voir un soutien aux organismes de prévention en matière environnementale et rappelle que le gouvernement conservateur «n'a jamais réussi à atteindre les cibles internationales les moins contraignantes» en matière de réduction des gaz à effet de serre.

La CSQ aurait voulu voir le gouvernement revenir sur sa réforme déjà annoncée de l'assurance-emploi, qu'elle juge «dévastatrice» particulièrement pour les travailleurs à statut précaire et qui résident dans les régions éloignées.

L'organisation, qui dit représenter près de 200 000 membres, déplore aussi que les fonctionnaires soient «encore ciblés» - faisant état des coupes prévues de 19 000 emplois.

Ainsi, la CSQ estime qu'il y a des problèmes beaucoup plus pressants que l'adoption d'une législation sur les budgets équilibrés, particulièrement dans le contexte de prévisions de croissance revues à la baisse au Canada et des problèmes budgétaires aux États-Unis.

«On lance le même message au gouvernement fédéral qu'on lance au gouvernement québécois, soit qu'on croit qu'il y a lieu de regarder la question de l'équilibre budgétaire et la question de la dette dans une perspective de ne pas étouffer l'économie. C'est l'occasion de ne pas mettre le dogme de l'équilibre à tout prix», a exprimé en entrevue téléphonique la présidente de la Centrale des syndicats du Québec, Louise Chabot.

La CSN soutient pour sa part que le gouvernement conservateur «a ni plus ni moins» annoncé dans son discours du Trône vouloir «continuer à sabrer» les services publics et «s'en prendre aux conditions des travailleuses et des travailleurs pour arriver à l'équilibre budgétaire».

Le président de la CSN, Jacques Létourneau, a dit par communiqué se désoler de voir les conservateurs tenter de redorer leur blason en révisant les mesures de sécurité pour le transport ferroviaire. «Il faut se rappeler que c'est à ce même gouvernement qu'on doit la déréglementation dans ce secteur, laquelle a certainement sa part de responsabilité dans la catastrophe de Lac-Mégantic», a-t-il fait valoir.

La CSN déplore aussi le «silence complet» du gouvernement concernant le régime d'assurance-emploi, affirmant que les «forces progressistes sont déjà bien organisées et vont demeurer sur le pied d'alerte».

La Fédération canadienne des municipalités a de son côté félicité le gouvernement fédéral pour sa «réponse» à la tragédie de Lac-Mégantic et pour les recommandations concernant la sécurité ferroviaire.

L'engagement du gouvernement à accroître la sécurité dans le transport des matières dangereuses et d'exiger que les expéditeurs et les sociétés ferroviaires aient des assurances additionnelles «répond directement» aux demandes du groupe de travail national de la FCM sur la sécurité ferroviaire, a-t-on fait valoir.

La FCM a dit avoir hâte de continuer à collaborer avec la ministre des Transports, Lisa Raitt, pour «transformer rapidement» ces engagements en actions «concrètes». Elle a salué la mise en place d'un Plan national d'atténuation des catastrophes.