Les inégalités sociales n'ont cessé de s'accentuer depuis l'arrivée des conservateurs au pouvoir, il y a plus de sept ans, estime le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, qui craint que l'écart entre les riches et les pauvres ne soit une véritable bombe à retardement pour la société canadienne.

Dans une entrevue accordée à La Presse en prévision de la rentrée parlementaire de mercredi, M. Mulcair a dressé un portrait peu flatteur du bilan du gouvernement Harper sur plusieurs fronts: la loi et l'ordre, la gestion des finances publiques ainsi que les investissements dans les programmes sociaux.

Mais c'est l'écart croissant entre les riches et les moins riches qui inquiète le plus le chef de l'opposition officielle aux Communes.

«Les différences entre les mieux nantis et les plus démunis de notre société n'ont jamais été aussi grandes», a affirmé M. Mulcair, en citant de nombreuses statistiques.

«Au cours des 35 dernières années, seulement 20% des Canadiens ont vu leurs revenus augmenter. L'autre 80% a connu une baisse de revenus réels. Les ménages canadiens sont les plus endettés des pays de l'OCDE. C'est une catastrophe. Leurs enfants paient plus que jamais pour leurs études et ils s'endettent plus que jamais. Il y a beaucoup de jeunes qui empruntent 40 000$ ou 50 000$ pour un bac universitaire. Quand est-ce qu'un jeune couple qui commence la vie avec une dette de 90 000$ est supposé s'acheter une maison? Pourtant, acheter une maison est une bonne chose», a lancé M. Mulcair.

«C'est une bombe à retardement, parce que la tendance s'aggrave. [...] C'est la première fois de notre histoire que la famille canadienne moyenne voit ses revenus diminuer. Donc, c'est une crise sociale et économique qu'on est en train de vivre. Pour la première fois de notre histoire, il y a toute une génération qui va avoir moins que ses parents. Et c'est de notre faute», a affirmé Thomas Mulcair.

Plusieurs des mesures adoptées par le gouvernement Harper, qui entreront en vigueur bien après les prochaines élections fédérales en 2015, ne permettront pas de renverser cette tendance. M. Mulcair cite en exemple la décision controversée des conservateurs de faire passer de 65 ans à 67 ans l'âge d'admissibilité au programme de sécurité de vieillesse à partir de 2023. Il souligne aussi la décision unilatérale du gouvernement Harper d'aligner la hausse des paiements de transfert aux provinces pour les programmes sociaux sur la croissance de l'économie canadienne à partir de 2017. Ces décisions auront inéluctablement des répercussions sur les plus pauvres de la société.

«Stephen Harper est en train de détruire les choses qui avaient été mises en place pour réduire les inégalités dans notre société", a ajouté M. Mulcair.

Une autre décision ayant des conséquences immédiates est celle d'accorder des réductions d'impôt aux entreprises, alors que le gouvernement fédéral nage en plein déficit. Cette mesure devait encourager les entreprises à utiliser leur nouvelle marge de manoeuvre pour embaucher des travailleurs et à investir dans l'innovation. Mais les entreprises ont plutôt décidé d'accumuler leurs avoirs. Cet «argent mort», comme l'a qualifié l'ancien gouverneur de la Banque du Canada Mark Carney, totalisait plus de 500 milliards il y a deux ans.

«Les conservateurs ont donné un énorme cadeau aux entreprises qui a donné zéro résultat», a soutenu M. Mulcair, qui s'est engagé à ramener les impôts des sociétés, aujourd'hui à 15%, à leur niveau de 2006, soit 22%.

En entrevue, M. Mulcair n'a pas manqué l'occasion de tourner en ridicule l'image des conservateurs voulant qu'ils soient les véritables gardiens de la loi et de l'ordre. Il donne en exemples les sénateurs nommés par Stephen Harper qui font l'objet d'une enquête policière, de même que l'ancien chef de cabinet du premier ministre, Nigel Wright, qui doit s'expliquer sur le fameux chèque personnel de 90 000$ qu'il a remis au sénateur Mike Duffy afin de l'aider à rembourser les contribuables pour les allocations de logement indûment empochées.

«Quand les gens font la somme de toutes les lois qui ont été bafouées par Stephen Harper et son équipe, ils sont en droit de rire un peu. [...] C'est une supercherie innommable de la part des conservateurs de se présenter comme des gens favorables à la loi et l'ordre, puisqu'ils sont les premiers à les violer», a-t-il affirmé.