Malgré une dernière session parlementaire difficile, l'argent coule à flots dans les coffres du Parti conservateur. Selon Élections Canada, les conservateurs ont amassé près de 5 millions au deuxième trimestre de 2013, un montant largement supérieur à ce qu'ont récolté le Parti libéral et le NPD. Analyse.

Une base de donateurs indéfectible

Les donateurs sont importants pour les partis politiques, qui comptent sur l'argent amassé pour employer de nouvelles personnes, améliorer l'équipement de travail ou rayonner d'un océan à l'autre grâce aux campagnes publicitaires. Sur la scène fédérale, les conservateurs peuvent compter sur une base indéfectible de donateurs, qui veut des résultats. «Les conservateurs, comme le Parti québécois sur la scène provinciale, sont appuyés par des gens qui ne sont pas intéressés à des rémunérations matérielles, mais qui attendent beaucoup des politiques qui vont dans leur sens idéologique. À cet égard, ces donateurs tranchent pas mal vis-à-vis des libéraux ou du NPD. Un parti peut compter sur ces personnes pour le financer sans trop de problèmes», croit Louis Massicotte, professeur titulaire au Département de science politique de l'Université Laval et expert dans le financement des partis politiques.

Des prête-noms à Ottawa?

Louis Massicotte ne croit plus en l'intégrité du système en place. «J'ai appris avec les années que ce qui semble être à première vue une série de contributions individuelles désintéressées est en fait tout autre. Tous les rapports financiers officiels, au Québec du moins, n'ont été pendant plusieurs années rien d'autre que de la frime. [Devant la commission Charbonneau], on a compris que les prête-noms sont utilisés depuis bien longtemps. Stephen Harper a implanté un système similaire de financement à Ottawa. Je pense que la même histoire se répète», clame-t-il.

La peur de perdre le pouvoir

Comment expliquer qu'après un printemps difficile et des sondages qui confirment leur descente dans l'opinion publique, les conservateurs connaissent autant de succès auprès des donateurs? Selon André Blais, spécialiste en politique canadienne à l'Université de Montréal, la base électorale et la base de donateurs sont deux réalités complètement différentes. «Ceux qui contribuent au financement sont des partisans convaincus. S'ils remarquent que le parti est en danger de perdre les prochaines élections, c'est une motivation évidente pour contribuer davantage. Surtout qu'il reste encore de l'espoir de remonter la pente», dit-il.

L'effet Trudeau perdurera-t-il?

Élu chef du Parti libéral du Canada en avril dernier, Justin Trudeau saura-t-il ramener sa formation politique au pouvoir, ou du moins dans le rôle de l'opposition officielle? La question est sur toutes les lèvres. Ce qui est certain, croit M. Blais, c'est qu'il ne faut pas sous-estimer le nouveau chef. «Même s'il demeure un grand inconnu, son expérience politique étant limitée, il pourrait profiter de la lassitude observée présentement contre le gouvernement. Tout est une question de conjoncture», croit-il. Le chef libéral doit toutefois s'attendre à ce que les conservateurs, avec des coffres aussi bien remplis, puissent multiplier les campagnes négatives à son sujet, si celles-ci portent des fruits dans l'opinion publique, croit-il.

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Un printemps difficile, des finances rayonnantes

Même si le printemps dernier a été difficile pour les conservateurs, qui figurent présentement au deuxième rang des intentions de vote au pays, les dons aux troupes de Stephen Harper atteignent de nouveaux sommets. Ils ont connu au dernier trimestre l'un des meilleurs résultats de leur histoire.

> 4,88 MILLIONS PARTI CONSERVATEUR

> 2,99 MILLIONS PARTI LIBÉRAL

> 1,37 MILLION NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE

> 318 996 DOLLARS PARTI VERT DU CANADA

> 78 624 DOLLARS BLOC QUÉBÉCOIS