Les nombreux obstacles au commerce intérieur qui subsistent au pays constituent un énorme frein à la croissance de l'économie canadienne et aux investissements étrangers, estime le ministre de l'Industrie, Christian Paradis.

Dans le contexte où le gouvernement Harper multiplie les pourparlers afin de conclure un traité de libre-échange avec de nouveaux partenaires étrangers, le Canada a tout intérêt à créer une véritable zone de libre-échange à l'intérieur de ses propres frontières, a ajouté le ministre dans une entrevue accordée à La Presse.

Abolir les barrières au commerce interprovincial doit être une priorité de tous les gouvernements, a soutenu le ministre, qui entend consacrer beaucoup de temps et d'énergie à ce dossier au cours des prochains mois, alors qu'il copréside cette année le comité du commerce intérieur.

Deux événements rendent l'abolition de ces barrières encore plus urgente: la crise économique qui a secoué les États-Unis et qui force les entreprises canadiennes à dénicher de nouveaux marchés, ainsi que les négociations de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne (UE).

Un éventuel accord de libre-échange entre le Canada et l'UE ferait en sorte qu'il serait plus facile pour une entreprise française de brasser des affaires dans n'importe quelle région du pays que pour une entreprise québécoise, a illustré le ministre Paradis.

Des coûts considérables

Selon certaines estimations, les barrières au commerce interprovincial coûteraient entre 3 et 49 milliards de dollars par année à l'économie canadienne. «La fourchette est très large, mais trois milliards de dollars en perte économique, c'est déjà trop», a affirmé le ministre.

M. Paradis a donné en exemple certains irritants qui lui ont été soulignés par des gens d'affaires: un camionneur de l'Alberta doit composer avec des règlements qui exigent différentes largeurs de pneus d'une province à l'autre s'il souhaite transporter de la marchandise vers l'est du pays. L'emplacement des étiquettes sur les vêtements varie d'une province à l'autre. Sans compter qu'il est difficile d'exporter du vin de la Colombie-Britannique vers les provinces de l'Est à cause des barrières commerciales.

«Dans le cadre de notre plan économique, nous avons toujours voulu créer un univers favorable à l'investissement et la création d'emplois. Nous avons un bon compte fiscal. Mais là où le bât blesse, ce sont les barrières au commerce provincial», a affirmé M. Paradis, en citant les exemples qui, a priori, sont loufoques pour plusieurs entreprises.

«Les gens d'affaires me disent qu'il leur est plus facile d'aller en Chine ou en Roumanie que d'aller au Québec, par exemple à cause des différentes réglementations. C'est un gros problème», a-t-il ajouté.

Négociations en vue

En tant que coprésident du comité du commerce intérieur cette année, M. Paradis souhaite donner une nouvelle impulsion aux pourparlers entre le gouvernement fédéral et les provinces, dans l'espoir de créer une véritable zone de libre-échange intérieure.

D'autant plus que le Canada a entrepris des négociations afin d'harmoniser les réglementations nationales avec celles de son principal partenaire commercial, les États-Unis, dans le cadre de l'accord Par-delà les frontières, paraphé par Stephen Harper et Barack Obama en février 2011.

Mais il tient à souligner qu'il mènera ces discussions en prenant bien soin de respecter les compétences des provinces. Le ministre Paradis se félicite d'ailleurs de la décision des provinces de l'Ouest - la Saskatchewan, l'Alberta et la Colombie-Britannique - de conclure un nouveau pacte, le New West Partnership, en 2010, afin d'éliminer les barrières qui nuisent au commerce, à l'investissement et à la mobilité de la main-d'oeuvre entre ces trois provinces.

Selon le ministre, ce genre d'entente devrait servir de modèle à l'ensemble des provinces. «On peut bâtir sur cela.»

Il y a deux semaines,

M. Paradis a réuni des gens d'affaires et des experts en matière de commerce dans le cadre d'un symposium sur le commerce intérieur à Ottawa. L'objectif de cette rencontre était de dégager des pistes de solution pouvant mener à la création d'une vraie zone de libre-échange au pays.