Les étudiants embauchés pour travailler comme guides touristiques sur la Colline du Parlement durant la belle saison sont formés pour faire l'éloge du Sénat et mépriser les démocraties comptant plus de deux partis politiques.

Le manuel de formation pour l'été 2013 comprend en effet une section sur l'importance de la chambre haute, qui est présentement ébranlée par une série de scandales sur les dépenses des sénateurs et des manquements à l'éthique.

Selon le document de 39 pages, les enquêtes menées par le Sénat sont de meilleure qualité que celles effectuées par les comités de la Chambre des communes parce qu'elles sont généralement non partisanes et peu couvertes par les médias, et parce que les sénateurs peuvent y consacrer beaucoup plus de temps puisqu'ils ne sont pas soumis aux exigences du processus électoral.

«L'absence de partisanerie est l'un des aspects positifs du très critiqué système de nomination», indique le manuel, dont La Presse Canadienne a obtenu une copie auprès de la Commission de la capitale nationale (CCN), qui est responsable du programme des guides étudiants, en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

Chaque printemps, 25 étudiants universitaires passent un examen basé sur le manuel, qui a été conçu pour les préparer à répondre aux questions des quelque 500 000 touristes qui visitent chaque année la Colline entre mai et août.

Les jeunes guides sont également invités à défendre la chambre haute en faisant valoir qu'elle est peu dispendieuse pour le trésor public.

«Le contribuable canadien peut avoir l'impression que les réalisations du Sénat ne valent pas l'argent consacré à son fonctionnement, mais une analyse des coûts réalisée en 1991-1992 a montré que le Sénat coûtait 1,61 $ par personne contre 8,49 $ par personne pour la Chambre des communes.»

En dépit de son parti pris en faveur du Sénat, le manuel répète à plusieurs reprises que les étudiants ne doivent pas s'engager dans des débats sur des questions controversées avec les touristes, notamment en ce qui concerne la monarchie et la reine Élizabeth II.

Un autre document de formation portant sur l'histoire canadienne conseille aux guides de ne pas aborder le sujet de l'indépendance du Québec et de la Constitution. Il contient aussi une section chantant les louanges d'un système politique à deux partis.

«Dans un système avec plusieurs partis, l'électeur peut ressentir de la confusion par rapport à la variété des problématiques et des solutions qui s'offrent à lui», assure-t-il, notant que le système à deux partis est plus «modéré».

«Le système bipartite a eu un effet unificateur dans des pays comme le Canada et les États-Unis, qui n'avaient pas au départ une grande unité.»

La semaine dernière, Judy Benvie, une représentante de la CCN, avait reconnu dans une lettre envoyée à La Presse Canadienne que certaines sections du manuel devaient être mises à jour et contenaient des informations qui n'étaient pas exactes.

«Nous révisons actuellement notre approche», a-t-elle révélé dans sa missive.

Le porte-parole de la CCN, Jean Wolff, a pour sa part affirmé que depuis le lancement du programme de guides étudiants en 1984, l'organisation n'avait reçu aucune plainte concernant les renseignements fournis par les jeunes aux touristes.

M. Wolff a précisé que les manuels actuels avaient été élaborés dans les années 1990 et mis à jour chaque année en fonction des commentaires des étudiants.