Le Parti libéral du Canada est sur le point de passer haut la main son premier test électoral depuis l'arrivée en poste de son nouveau chef Justin Trudeau.

Les sondages donnent une avance de plus de 30% à la candidate libérale Yvonne Jones, dans l'élection partielle qui se tient aujourd'hui dans la circonscription de Labrador. Cette vaste circonscription couvre l'ensemble du territoire du même nom, à l'est du Québec.

La campagne a été déclenchée par la démission du ministre conservateur Peter Penashue. Élections Canada a découvert de nombreuses contributions illégales dans ses états financiers de la dernière campagne électorale, qu'il a remportée par une marge de moins de 100 votes.

Ce serait donc un retour aux sources pour les habitants de la presqu'île, qui ont élu quasi systématiquement des députés libéraux depuis l'entrée de Terre-Neuve-et-Labrador dans la Confédération, il y a plus de 60 ans.

La victoire du politicien innu, un leader de longue date au sein de sa communauté, avait été attribuée en partie aux efforts déployés par les conservateurs fédéraux pour faire une percée dans la province où ils avaient été blanchis en 2008. L'ancien premier ministre terre-neuvien Dany Williams y avait mis sur pied une féroce campagne anti-Harper pour protester contre certaines de ses décisions.

L'argument principal de Stephen Harper en 2011 était une promesse de garantie de prêt pour permettre au projet hydroélectrique de Muskrat Falls d'aller de l'avant. Mais ce financement ne fait pas l'unanimité, même au Labrador où se trouvera la future centrale.

Lors d'un entretien téléphonique avec La Presse, l'auteur et chroniqueur du Labrador Michael Johansen a noté que le scandale des contributions électorales reçues par Peter Penashue a pu influencer l'attitude des électeurs et les intentions de vote. Les enjeux de la campagne ont été principalement locaux, a cependant ajouté le collaborateur du Telegram de Saint-Jean de Terre-Neuve, dont la pénurie de logements, les problèmes des transports... et le projet hydroélectrique du Bas Churchill. «Tous les chemins mènent à Muskrat Falls», a-t-il lancé.

Un effet Trudeau?

La popularité actuelle de Justin Trudeau, qui surfe lui-même sur sa propre vague de succès dans les sondages, a pu aider sa candidate Yvonne Jones, mais de manière plus marginale, estime M. Johansen. «C'est comme les décorations sur un gâteau... Ça aide à le rendre plus attrayant, mais il est déjà assez sucré!»

Yvonne Jones, une doyenne à la Chambre d'assemblée avec 17 ans d'expérience, est bien connue dans la province. Cette notoriété semble avoir joué en sa faveur, et en la défaveur du candidat du NPD. Le jeune Harry Borlase a récolté de 10 à 17% dans les derniers sondages publiés, tandis que Mme Jones se maintenait à environ 60%. M. Penashue, pour sa part, ne récolte que 20 et 29% des intentions de vote.

Un effet Trudeau? À Ottawa la semaine dernière, le nouveau chef libéral a préféré parler des premiers signes d'un soulèvement anticonservateur. «C'est une première occasion pour les Canadiens d'envoyer un message extrêmement clair à M. Harper, que la façon qu'il fait de la politique n'est plus acceptable», a-t-il dit.

Et même si tout est encore possible, le spectre de la division du vote, brandi par la chef du Parti vert Elizabeth May au début des élections, semble ne s'être jamais réellement matérialisé. Mme May avait invité son homologue néo-démocrate Thomas Mulcair à faire comme elle et à ne pas opposer de candidat aux libéraux pour éviter une autre victoire conservatrice. Une offre rejetée par M. Mulcair, qui n'avait toujours pas baissé les bras la semaine dernière - du moins publiquement. «Je ne connais qu'une seule méthode lorsqu'il s'agit de concours électoraux: c'est de travailler d'arrache-pied», a-t-il dit mercredi.