Le ministre des Finances, Jim Flaherty, veut faire davantage appel au secteur privé pour assurer la formation de la main-d'oeuvre, au lieu de se fier uniquement aux provinces, dans l'espoir de pourvoir plus rapidement les nombreux postes qui demeurent vacants au pays.

M. Flaherty compte ainsi mettre à la disposition des entreprises tout près de 300 millions de dollars pour accélérer la formation des travailleurs et s'attaquer à la grave pénurie de main-d'oeuvre qui frappe certains secteurs, notamment les métiers dits traditionnels, a appris La Presse.

Cette somme ne serait pas de l'argent frais, mais proviendrait de l'enveloppe de 500 millions remise annuellement aux provinces depuis 2008-2009, dans le cadre des ententes sur le marché du travail destinées à «accroître l'employabilité et les compétences de la main-d'oeuvre» au pays. Ces ententes viennent à échéance en 2013-2014 et la part du Québec de cette enveloppe est d'environ 116 millions par année.

Les entreprises pourraient puiser dans cette enveloppe à condition qu'elles investissent une somme équivalente dans la formation de la main-d'oeuvre. Les provinces seraient aussi invitées à verser la même somme. Elles conserveraient le reste de l'enveloppe, soit 200 millions, pour l'administration de cette nouvelle politique, selon nos informations.

Cet appel au secteur privé s'inscrirait dans une stratégie nationale de la formation de la main-d'oeuvre destinée à maximiser les investissements du gouvernement fédéral dans ce domaine.

Peu de résultats concrets

Ottawa constate que les 500 millions supplémentaires versés annuellement aux provinces pour favoriser la formation de la main-d'oeuvre entre 2008-2009 et 2013-2014 n'ont pas donné de résultats concrets. En fait, Ottawa évalue que près de 80% des sommes allouées ont été utilisées pour fournir des conseils et des informations générales sur les emplois au lieu de financer des programmes de formation pour ceux qui n'ont pas droit à l'assurance-emploi.

En privé, le ministre Jim Flaherty a confié à certains qu'il souhaite aussi plus de responsabilisation de la part des provinces à cet égard. Ce changement de politique répondrait d'ailleurs à une demande du secteur privé, qui s'est aussi montré critique des résultats obtenus jusqu'ici par les provinces.

En tout, le gouvernement fédéral remet près de 2,5 milliards de dollars par année aux provinces pour la formation de la main-d'oeuvre. Québec a une entente particulière avec le fédéral sur la formation de la main-d'oeuvre depuis 1997. Le changement proposé par Ottawa pourrait indisposer le gouvernement Marois.

Dans une lettre envoyée aux députés conservateurs, hier, le ministre Flaherty a indiqué qu'il compte profiter de son prochain budget pour mieux encadrer les programmes de formation de la main-d'oeuvre.

«Un trop grand nombre de postes restent vacants au Canada parce que les employeurs n'arrivent pas à trouver des travailleurs possédant les compétences requises. La formation offerte au Canada ne reflète pas bien les compétences dont les employeurs ont besoin. Cela entraîne un taux de chômage plus élevé et une croissance économique plus faible que ce à quoi nous devrions normalement nous attendre. Nous pouvons faire mieux. Le plan d'action économique 2013 prévoit des mesures pour relever cet enjeu important», a indiqué le ministre.

Plan d'infrastructure reconduit

Dans cette lettre, M. Flaherty confirme aussi qu'il compte proposer un nouveau plan d'infrastructure dans son budget, ce qui donnerait suite à une requête formulée par la Fédération canadienne des municipalités. Le plan devrait être doté essentiellement du même budget (environ 4,5 milliards de dollars par année, y compris le transfert d'une partie de la taxe sur l'essence et le remboursement de la TPS aux municipalités) et s'échelonner sur plusieurs années.

«Notre gouvernement a investi dans plus de 43 000 projets dans le cadre du Fonds Chantiers Canada et de la phase de relance du plan d'action économique. Il faut faire plus», soutient-il à cet égard.

Dans son budget, M. Flaherty doit aussi confirmer son intention d'éliminer le déficit, qui devrait atteindre 26 milliards en 2012-2013, avant les prochaines élections de 2015. Pour y arriver, il devra annoncer de nouvelles compressions de quelque 2 milliards de dollars en raison du ralentissement de l'économie canadienne, de la chute des prix des matières premières et des revenus moins élevés que prévu. Il compte aussi mettre fin à certaines échappatoires fiscales qui profitent aux nantis.