La défection du député Claude Patry, passé au Bloc québécois, renforce la position du Nouveau Parti démocratique (NPD) comme parti fédéraliste, a affirmé hier Thomas Mulcair lorsqu'il a été questionné à ce sujet à Washington.

Au deuxième jour de son voyage aux États-Unis, le chef néo-démocrate a présenté ses positions sur l'économie et l'environnement devant le Woodrow Wilson Center. Mais il a aussi dû défendre sa capacité à maintenir l'unité nationale du Canada en cas de victoire du NPD aux prochaines élections.

«Avec la défection et le débat sur la Loi sur la clarté, comment pouvez-vous rassurer les Américains sur le fait que, lorsqu'il formera le gouvernement, le NPD, fort de sa base québécoise, sera d'abord stable et ensuite fédéraliste?», a demandé un représentant du Lexington Institute, groupe de recherche de droite.

M. Mulcair a d'abord souligné que l'élection de 59 députés néo-démocrates au Québec en mai 2011 est importante: c'est la première fois en une génération que les Québécois optent pour un parti fédéraliste. Il a également noté que M. Patry a quitté les rangs de son parti justement parce qu'il le juge trop fédéraliste.

«Le départ de ce collègue a ouvert un corridor beaucoup plus large pour nous, a-t-il affirmé. Les Canadiens réalisent maintenant que nous sommes un parti fédéraliste qui défend fermement le Canada, mais qui prône une meilleure place pour le Québec au sein du Canada.»

M. Mulcair estime que la Déclaration de Sherbrooke, document politique adopté en 2006, vise justement à clore le débat sur la question nationale en permettant au Québec de trouver son compte dans le Canada. Le document répond à «des décennies de provocation» de la part des partis fédéraux, dont l'objectif était d'agiter le spectre de la séparation pour recueillir des votes à l'extérieur du Québec.

Le leader néo-démocrate a été vivement critiqué au Canada anglais pour sa proposition de modifier la Loi sur la clarté référendaire afin qu'Ottawa reconnaisse un référendum gagné avec une majorité de 50% plus un vote. Le projet de loi a mené à la défection de M. Patry, qui s'oppose aussi à une autre disposition du texte voulant que la question référendaire devait être claire.

Les conservateurs se sont régalés de cette défection, en qualifiant le NPD de «bloc orange» et en le dépeignant comme un nid de «séparatistes».

Un Canada méconnaissable

M. Mulcair a profité de la tribune pour dénoncer le gouvernement Harper au sujet de sa politique étrangère et de son bilan environnemental. Il a rappelé que le Canada était autrefois considéré comme un artisan de la paix dans le monde, ce qu'il n'est plus aujourd'hui.

«Le Canada que les conservateurs projettent sur la scène internationale n'est plus reconnaissable aux yeux des pays avec lesquels nous travaillons étroitement, et il n'est plus reconnaissable pour nous-mêmes», a-t-il dénoncé.

Il a rappelé le retrait du Canada du protocole de Kyoto et les nombreux accrocs entre Ottawa et les Nations unies.

«Ce n'est pas productif, a dit M. Mulcair. C'est une manière d'apaiser sa base de droite, mais ce n'est pas une manière de faire avancer le monde.»

Opposition à Keystone XL

Le chef du NPD a par ailleurs réitéré ses critiques envers l'oléoduc Keystone XL, qui acheminerait du pétrole des sables bitumineux vers les raffineries américaines du golfe du Mexique. À ses yeux, il faut d'abord expédier la ressource vers le marché de l'est du Canada plutôt que de l'exporter.

Cette stratégie permettrait d'assurer l'indépendance énergétique du Canada tout en créant des emplois ici. Elle permettrait aussi d'éviter des situations comme celle de la raffinerie Ultramar de Lévis, qui doit s'approvisionner en pétrole brut provenant du Texas.

«Notre priorité, comme n'importe quel État-nation, devrait être de créer des emplois dans notre propre pays avec nos propres ressources naturelles, a-t-il dit. De la valeur ajoutée, c'est un principe de base que tout le monde devrait privilégier.»