Le premier ministre Stephen Harper entamera demain une visite officielle de cinq jours en Inde, son deuxième séjour en trois ans. À l'horaire, visite du Taj Mahal, entretien avec son homologue indien Manmohan Singh et séjour à Chandigarh, dans l'État du Penjab, d'où la plupart des immigrés indiens au Canada sont originaires. Cette opération de séduction aura pour but de faire progresser les négociations avec l'Inde sur plusieurs dossiers. Notre collaborateur fait le point sur trois des enjeux principaux de cette visite.

Nucléaire civil : discussions à relancer

Lors de sa visite en Inde en novembre 2009, Stephen Harper s'était félicité de la relance du dialogue avec New Delhi. «Mon gouvernement a approfondi les relations comme aucun de mes prédécesseurs ne l'avait fait», avait-il lancé.

Pendant des années, les relations indo-canadiennes sont en effet restées au point mort. Ottawa avait entamé une coopération nucléaire civile avec l'Inde dans les années 50. Mais New Delhi avait utilisé le plutonium du réacteur fourni par le Canada pour fabriquer sa première bombe nucléaire en 1974.

Le contentieux a assombri les relations indo-canadiennes pendant longtemps. Mais Stephen Harper veut aller de l'avant. Les deux pays ont signé un accord de coopération sur le nucléaire civil en 2010.

Le texte peine toutefois à se concrétiser. Aucune entreprise canadienne n'a vendu de centrale ou de combustible en Inde. Les discussions achoppent sur un point: le Canada réclame un droit de regard sur le combustible et le matériel nucléaire qui seraient vendus au pays.

New Delhi rejette cette demande. «L'Inde ne s'est jamais livrée à des activités de prolifération nucléaire, rappelle Christopher Raj, professeur au département d'études des Amériques de l'Université Jawaharlal Nehru, de Delhi. Cette condition n'a pas de sens et il est peu probable que le gouvernement indien cède.» Au ministère indien des Affaires étrangères, on se contente de préciser que les discussions continuent. Difficile de dire si elles déboucheront sur un accord durant la visite de Stephen Harper.

Stimuler les investissements

«Même si l'économie indienne ralentit, le marché intérieur est gigantesque, s'est enthousiasmé un diplomate canadien il y a quelques mois. C'est un pays prometteur pour nos investisseurs. Hélas, plusieurs secteurs comme la grande distribution, l'assurance, l'aviation civile demeurent fermés.»

Depuis, le contexte a changé et le gouvernement a assoupli les règles. Les entreprises étrangères de la grande distribution peuvent détenir jusqu'à 51% du capital d'un groupe indien. Dans le secteur de l'assurance, la participation au capital peut maintenant atteindre 49%. «Nous espérons que la visite de Stephen Harper contribuera à accroître les investissements», confie Vikram Doraiswami, secrétaire d'État indien chargé du secteur Amériques.

Toutefois, ces mesures doivent être votées par le Parlement pour entrer en vigueur. Or, plusieurs partis s'y opposent. Le Trinamool Congress, membre de la coalition parlementaire, a d'ailleurs retiré son appui au gouvernement. Le parti du Congrès, au pouvoir à Delhi, ne dispose pas d'une majorité absolue.

Échanges commerciaux à favoriser

En 2009, Stephen Harper s'était engagé, avec Manmohan Singh, à faire passer le total des échanges commerciaux entre les deux pays de 4 à 15 milliards de dollars d'ici 2015. Trois ans plus tard, l'objectif est loin d'être atteint puisque les échanges n'ont totalisé que 5,1 milliards de dollars en 2011.

Le sujet figurera en bonne place dans les discussions. Pour réaliser leur objectif, les deux dirigeants devraient travailler à accroître le commerce d'hydrocarbures. Le ministre des Ressources naturelles, Joe Oliver, fera d'ailleurs partie de la délégation canadienne.

L'Inde cherche à diversifier ses importations de gaz et de pétrole, en particulier depuis qu'elle a réduit ses importations de brut iranien pour faire pression sur Téhéran à la demande des États-Unis.