Un député conservateur a défendu mardi sa décision de décerner une médaille royale à deux militantes antiavortement condamnées à des peines de prison.

Maurice Vellacott, qui représente la circonscription de Saskatoon-Wanuskewin, en Saskatchewan, a accordé la Médaille du jubilé de diamant aux Torontoises Linda Gibbons et Mary Wagner, deux militantes bien connues du mouvement pro-vie.

Mme Wagner se trouve derrière les barreaux. Elle a été arrêtée pour avoir défié une ordonnance du tribunal en faisant irruption dans une clinique d'avortement pour parler à des patientes.

Mme Gibbons a passé une dizaine d'années en prison pour des crimes semblables au cours des dernières années.

Deux poids, deux mesures

Le député Vellacott affirme que ces deux femmes sont «de véritables héroïnes de l'humanité», qu'il compare à Martin Luther King, héros des droits civiques aux États-Unis. Il souligne qu'Henry Morgentaler, figure de proue du mouvement pro-choix, a reçu l'Ordre du Canada.

«C'est le monde à l'envers lorsque nous honorons des avorteurs comme Henry Morgentaler pour avoir tué plus de 5000 bébés et que nous emprisonnons des femmes précieuses comme Mary Wagner et Linda Gibbons, qui tentent de sauver des bébés d'une telle sauvagerie», a-t-il affirmé dans une déclaration.

La Médaille du jubilé de diamant de la reine Élisabeth II a été créée dans le cadre des célébrations qui marquent cette année le 60e anniversaire de l'accession au trône de la monarque britannique. Environ 60 000 Canadiens recevront la distinction en reconnaissance de leur contribution à la société. Les députés fédéraux distribuent chacun 30 médailles.

Des réactions mitigées

Les nominations de M. Vellacott ont semblé prendre de court ses collègues conservateurs. Le ministre de la Justice, Rob Nicholson, qui a adopté plusieurs lois pour durcir les peines contre les criminels, a lâché un «je vous demande pardon?» lorsqu'un journaliste l'a interrogé sur le choix de son collègue.

Il a par la suite refusé de commenter l'affaire, malgré des questions répétées.

Le bureau du premier ministre Stephen Harper a également refusé de commenter l'affaire.

Le chef libéral Bob Rae a qualifié la décision de M. Vellacott d'«inappropriée». «Ça me surprend que ce soit acceptable de donner des médailles à ceux qui sont en prison pour des causes», a-t-il affirmé.

«On va jusqu'à valoriser et mettre sur un piédestal des femmes qui sont rendues en prison parce qu'elles n'ont pas respecté la Cour», a dénoncé le député bloquiste André Bellavance.

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, a pour sa part réagi avec prudence à la nouvelle. «Il faut comprendre que c'est un programme qui n'est pas normé, souvent géré dans les bureaux de circonscription, a-t-il indiqué. Alors ça va être à chaque député d'expliquer selon le cas.»

Le bureau du gouverneur général, l'émissaire de la reine au Canada, a refusé de transmettre à La Presse la liste des récipiendaires de ces médailles, affirmant que c'est aux députés de la rendre publique. Une liste complète des Canadiens qui sont honorés sera diffusée en février.