Même si elle a refusé de rencontrer le président congolais Joseph Kabila, Pauline Marois a accepté d'avoir un entretien avec son premier ministre, Augustin Matata Ponyo, dimanche. Elle l'a jugé plus fréquentable. Elle a appelé à des «avancées» et des «progrès» quant au respect des droits de la personne.

Le premier ministre canadien Stephen Harper a lui aussi rencontré M. Ponyo afin de « soulever les problèmes des droits de la personne et de la démocratie ».

Pauline Marois a offert à M. Ponyo les services du Directeur général des élections du Québec, Jacques Drouin, pour collaborer à l'organisation du scrutin présidentiel de 2016.

L'an dernier, Joseph Kabila a été reporté au pouvoir à la suite d'une élection entachée par plusieurs fraudes et irrégularités. C'est pour cette raison que Pauline Marois n'a pas voulu le rencontrer.

Elle a tout de même participé au souper officiel offert par M. Kabila samedi soir, en compagnie d'autres chefs d'État et de gouvernement, dont Stephen Harper.

Pauline Marois a expliqué en conférence de presse son choix d'accepter l'invitation de M. Ponyo. « Dans nos rencontres avec les organisations non gouvernementales et avec Kim Nguyen (réalisateur du film Rebelle, tourné à Kinshasa), on nous a dit que ce serait intéressant de rencontrer le premier ministre parce qu'il a mis de l'avant des changements qui améliorent la situation d'un certain nombre de Congolais. Nous avions rencontré l'opposition (vendredi) et, suite à la demande du premier ministre, nous avons cru que c'était justifié de le rencontrer », a-t-elle plaidé quelques heures avant la clôture du 14e Sommet de la Francophonie.

M. Ponyo est membre du parti du président sans en avoir été un ténor dans le passé. Joseph Kabila l'a nommé premier ministre en avril. On le décrit dans la presse française et africaine comme un « technocrate » et un « gestionnaire rigoureux ».

Rencontrer M. Ponyo ne revient pas à légitimer l'élection présidentielle de 2011, a insisté Pauline Marois. Lors de l'entretien, elle a « abordé directement la question de la démocratie» et a dit souhaiter «des avancées et des progrès ». « Dire directement ce message, c'est significatif », a-t-elle soutenu.

Selon elle, pour le scrutin de 2016, le DGE du Québec pourra « donner son expertise et agir comme observateur » afin de s'assurer que « les élections sont réellement libres ».

Pauline Marois a reconnu qu'un « malaise » était partagé par plusieurs quant à la tenue du Sommet en République démocratique du Congo. « Probablement que ce serait souhaitable » que les prochains aient lieu dans des démocraties reconnues, selon elle. « Mais en même temps, le fait d'être ici, plusieurs chefs d'État ont pris position sur la question de la démocratie et du respect des droits. Quand on leur dit directement chez eux, c'est plus gênant je crois que de le dire quand on est loin parce qu'on se sent moins concerné. Et nous, en étant là, on envoie un message au peuple congolais qu'on sera à ses côtés dans cette recherche de la démocratie », a-t-elle affirmé.

Notons que le président français François Hollande a rencontré Joseph Kabila pour l'exhorter à respecter la démocratie et les droits de la personne.

LA RDC «pas du tout complexée»

Lors de la conférence de presse de clôture du sommet, Joseph Kabila a balayé d'un revers de la main les reproches qui lui ont été faits toute la fin de semaine. «La RDC n'est pas du tout complexée par le niveau de démocratie et la situation des droits de l'homme», a-t-il lancé.

«Nous pratiquons la démocratie dans ce pays par conviction. Nous pensons être sur la bonne voie. [...] Quant aux droits de l'homme, je n'ai pas grand-chose à dire. Les exactions des droits de l'homme à l'est du pays sont dues à la guerre qui nous est imposée.»

Dans leur déclaration finale, les membres de la Francophonie confirment leur «détermination à promouvoir la gouvernance démocratique et les droits de l'Homme».

«Nous réaffirmons la nécessité d'organiser des élections libres, fiables et transparentes afin de garantir la légitimité démocratique des institutions et d'assurer un déroulement apaisé des consultations électorales», souligne-t-on.

La Francophonie «attache une importance particulière à l'appropriation durable par (les) États et gouvernements membres des capacités électorales». Elle «salue» la création du Réseau des compétences électorales francophones, à Québec l'an dernier. Son siège social se trouve d'ailleurs dans la capitale et son secrétaire général est Jacques Drouin, Directeur général des élections du Québec.