Le directeur parlementaire du budget (DPB), un poste créé par le gouvernement conservateur en 2006, a outrepassé son mandat, a déclaré mardi le ministre des Affaires étrangères, John Baird.

L'actuel DPB, Kevin Page, a publié cette semaine un avis juridique indiquant que 64 ministères et organismes fédéraux enfreignaient présentement la loi en ne lui remettant pas certains renseignements élémentaires.

Dans l'avis, des avocats rappellent que la Loi sur le Parlement du Canada exige que le gouvernement fédéral fournisse les données financières et économiques au DPB en temps opportun.

M. Baird n'a pas directement discuté de l'avis juridique à la Chambre des communes mais, questionné par le Nouveau Parti démocratique (NPD), il a toutefois laissé entendre que M. Page avait dépassé les bornes.

«Avec tout le respect que je lui dois, je pense qu'il arrive parfois au directeur parlementaire du budget d'outrepasser son mandat», a affirmé John Baird.

Le ministre des Affaires étrangères, qui remplaçait le premier ministre Stephen Harper en son absence, a ajouté que les conservateurs croyaient en l'efficacité des mécanismes de communication de données budgétaires qu'ils avaient pourtant estimés inadéquats il y a six ans.

«Je m'engage à ce que le gouvernement continue à fournir au Parlement, par le biais des estimations, des estimations supplémentaires, des rapports trimestriels et des comptes publics, tous les renseignements financiers dont il a besoin pour faire son travail», a-t-il indiqué.

Créé en vertu de la Loi fédérale sur la responsabilité en 2006, le DPB a pour mission de fournir une analyse indépendante de l'état des finances du pays ainsi que des dépenses gouvernementales pour les programmes présents et proposés.

«En établissant une autorité parlementaire pour le budget, la loi assurera que les comités parlementaires auront accès à des analyses indépendantes et objectives sur les questions économiques et fiscales», avait expliqué M. Baird à un comité en mai 2006.

Diane Ablonczy, qui était à l'époque secrétaire parlementaire du ministre des Finances, avait déclaré à la Chambre des communes en avril 2006 que le nouveau poste de DPB permettrait d'avoir une idée de la situation financière réelle du pays.

«Parce que les chiffres qui ont été donnés aux Communes dans différentes circonstances n'étaient pas, disons-le, aussi fiables qu'ils auraient dû l'être, nous mettrons en place un nouveau moyen de vérifier et de faire contrepoids», avait précisé Mme Ablonczy.

Mais depuis, le gouvernement conservateur s'est souvent disputé avec Kevin Page, le ministre des Finances, Jim Flaherty, allant même jusqu'à dire qu'il n'était ni fiable, ni crédible.

Même si les conservateurs ont critiqué le travail d'analyse de M. Page par le passé, c'était la première fois mardi qu'ils suggéraient que le DPB n'avait pas le droit d'examiner les livres alors que c'est la raison d'être du poste.

Kevin Page veut savoir combien d'employés seront mis à pied et quels programmes seront supprimés dans le cadre des coupes budgétaires du gouvernement pour 2012 afin de vérifier si les économies annoncées sont réalistes.

Seulement 18 des 82 organismes fédéraux ont répondu à sa demande. Le puissant greffier du Conseil privé a ensuite informé le DPB qu'il ne recevrait aucun autre renseignement avant que les employés concernés ne soient avisés de leur licenciement cet automne.

Pendant ce temps, la majorité conservatrice a adopté le projet de loi budgétaire lundi, qui doit maintenant être approuvé par le Sénat.

Le chef du NPD, Thomas Muclair, a qualifié le commentaire de John Baird sur le mandat du DPB comme un avertissement adressé à Kevin Page parce qu'il a fait la pire erreur, soit de ne pas dire aux conservateurs ce qu'ils veulent entendre et d'essayer de communiquer la vérité à la population.

Bob Rae, le leader libéral, a pour sa part déclaré que les propos de M. Baird relevaient de la diffamation et n'avaient aucun fondement. Il a ajouté que les conservateurs sabordaient l'autorité et l'indépendance de quelqu'un qu'ils avaient eux-mêmes nommé.