L'ancienne conseillère de Gilles Duceppe, Marie-France Charbonneau, a utilisé les services de recherche du Bloc québécois à Ottawa, payés à même les fonds publics, afin de mener à bien la recherche et la rédaction de son mémoire portant sur l'influence du Bloc québécois sur les programmes publics.

Des sources bloquistes ont indiqué à La Presse que Mme Charbonneau, qui est la conjointe de François Leblanc, ancien chef de cabinet de Gilles Duceppe, avait eu recours aux recherchistes du parti pour l'épauler dans la rédaction de son mémoire, déposé le 2 novembre 2009 à l'École nationale d'administration publique (ENAP).

M. Leblanc aurait même fait envoyer une note à l'équipe de recherchistes dans laquelle il les aurait invités à répondre aux demandes de sa conjointe.

«Les recherchistes devaient traiter les demandes [de Mme Charbonneau] en priorité», a confirmé une source bloquiste digne de foi.

Une autre source qui a travaillé au service de recherche a indiqué que ces demandes indisposaient les recherchistes, mais qu'ils n'osaient guère les rejeter parce qu'ils craignaient de subir les foudres de François Leblanc.

«On ne pouvait certainement pas se plaindre au chef de cabinet. Il était le conjoint de Marie-France Charbonneau», a fait valoir cette source.

Une troisième source bloquiste, qui a aussi requis l'anonymat de peur d'être l'objet de représailles, a indiqué que cette situation «était bien connue au sein du Bloc québécois», mais que personne ne voulait remettre en question les démarches de Mme Charbonneau.

Dans le mémoire en question, Mme Charbonneau prend d'ailleurs le temps de remercier, dès la première page, certains employés du Bloc québécois, dont Pierre-Paul Roy, proche collaborateur de Gilles Duceppe pendant plusieurs années.

«J'aimerais témoigner de ma reconnaissance envers ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à la réalisation de ce travail. [...] Merci à Pierre-Paul Roy du Bloc québécois qui a veillé à ce que ce projet d'intervention respecte le mandat donné par l'organisation et qui a facilité l'accès à l'ensemble des informations nécessaires pour réaliser ce travail», écrit Mme Charbonneau.

«Merci à cette formidable équipe de travail. Des réceptionnistes aux adjoints, des agents de liaison aux gens des communications, du service de recherche aux conseillers et au chef de cabinet, tous, vous êtes exceptionnels», ajoute-t-elle dans ses remerciements.

Jointe hier, Mme Charbonneau a indiqué avoir rencontré des recherchistes du Bloc québécois durant la préparation de son mémoire, mais elle affirme qu'ils n'ont pas fait de recherche.

«J'ai effectivement rencontré des recherchistes. Je leur ai effectivement demandé, posé des questions de façon plus pointue. Ils n'ont pas fait de recherche pour moi. Ils m'ont fourni des documents. J'avais déjà accès à certains documents, mais ils m'ont fourni d'autres documents, des fiches techniques que je n'avais pas nécessairement en main», a dit Mme Charbonneau.

Elle a ajouté qu'elle a également interrogé des journalistes dans le cadre de son mémoire, notamment Manon Cornellier du Devoir et Daniel Leblanc du Globe and Mail.

Quant à Pierre-Paul Roy, Mme Charbonneau a indiqué qu'il faisait «le lien avec l'ENAP et le professeur [Guy Lachappelle]». «J'ai demandé à Pierre-Paul Roy de le faire. Je savais que cela lui demanderait un petit peu de temps supplémentaire en soirée et tout cela. Il a gentiment accepté», a-t-elle dit.

Elle a nié que des demandes devaient être traitées en priorité. «C'est tout à fait faux. C'est tout à fait faux. On ne peut pas être à la Chambre des communes et monopoliser un service de recherche pour un mémoire de maîtrise alors qu'il y a une période de questions à préparer», a-t-elle dit.

Durant l'entrevue, Mme Charbonneau a tenu à répliquer à ses détracteurs qui ont affirmé à La Presse qu'elle empochait un salaire annuel de 90 000$ même quand elle poursuivait des études et écrivait un livre sur le Bloc québécois. Certains lui ont aussi reproché d'être souvent absente à Ottawa.

«J'étais directrice de tournée de Gilles Duceppe. M. Duceppe a fait quelque 200 tournées entre 1999 et 2011. Pensez-vous qu'il ait été possible d'étudier sans travailler? On ne peut pas être directrice de tournée de Gilles Duceppe sans travailler! Je me suis occupée de certaines des tournées des députés aussi», a-t-elle dit.