Le Bloc québécois a un nouveau chef. Daniel Paillé a succédé, dimanche, à Gilles Duceppe à la tête de la formation souverainiste. C'est ce vétéran de 61 ans que les membres ont choisi pour remettre le parti sur les rails, un peu plus de sept mois après la cuisante défaite électorale de mai dernier.

«Le Bloc québécois est toujours vivant, et il faut regarder par en avant», a-t-il déclaré aux militants rassemblés dans un hôtel de Montréal.

M. Paillé était le seul non-élu à briguer la direction du Bloc. Il a obtenu 61,28% des voix au deuxième tour et a coiffé les députés Maria Mourani et Jean-François Fortin dans le scrutin postal.

Le nouveau chef devra maintenant s'atteler à une tâche colossale: redonner vie à un parti qui a été passé à tabac lors des dernières élections fédérales. De 47 députés, le Bloc est maintenant réduit à 4 représentants aux Communes.

La dégelée s'est également fait ressentir à l'interne, puisque le parti a perdu des milliers de membres depuis le 2 mai. Même la course à la direction - généralement une période de grande effervescence dans les partis politiques - n'a pas permis d'inverser la tendance.

Sur près de 50 000 membres en règle du Bloc, plus de 13 600 n'ont pas renouvelé leur adhésion avant le 18 novembre, date limite pour participer à l'élection du nouveau chef. Et de ceux qui avaient le droit de vote, environ 14 000 (38,7%) l'ont exercé.

«S'il y avait eu plus de votants, c'est sûr que j'aurais aimé ça, a convenu Daniel Paillé. Mais 14 000, c'est quand même du monde. C'est, aux dernières nouvelles, deux fois le nombre d'adhérents au NPD au Québec.»

Plusieurs membres ignoraient qu'une course à la direction était en cours, a relaté la candidate défaite Maria Mourani, députée d'Ahuntsic. Même si elle souligne qu'un taux de participation de 40% est acceptable pour un scrutin postal, elle estime que le parti a fort à faire pour reconquérir sa base.

«Nous allons avoir à faire un gros travail de mobilisation et de reconstruction», a-t-elle indiqué.

Harper dans la ligne de mire

Dans son discours, M. Paillé a abondamment critiqué le premier ministre Stephen Harper, qu'il qualifie de «pyromane» qui s'apprête à «mettre le feu» au registre des armes à feu.

«Nous sommes de plus en plus nombreux à ne pas nous reconnaître dans son État sans distinction, ni compassion, ni rémission», a-t-il dénoncé.

Selon lui, même les plus ardents fédéralistes sont déçus par le gouvernement Harper. Il s'activera donc à les convaincre - un à un s'il le faut, précise-t-il - d'adhérer à la souveraineté.

M. Paillé a par ailleurs prédit que la lune de miel entre les Québécois et le Nouveau Parti démocratique tire à sa fin. Cette formation, qui a fait élire 59 députés le 2 mai, est trop «centralisatrice» et elle n'arrivera jamais à défendre les intérêts du Québec, dit-il.

«On peut se dire que les solutions concrètes proposées par le NPD depuis sept mois, je n'en ai pas vu beaucoup qui satisfont les valeurs du Québec», a-t-il affirmé.

Les perdants se rallient

Les deux candidats défaits, Mme Mourani et M. Fortin, ont promis de travailler de concert avec leur rival dans la course.

«Au-delà des divergences de points de vue que nous avons, on reste dans la même famille et on se doit de travailler ensemble», a indiqué M. Fortin.

Aucun député n'aura besoin de lui céder son siège à court terme, toutefois, puisque M. Paillé a toujours maintenu qu'il n'entend pas se faire élire à la Chambre des communes rapidement. Il n'exclut pas de se présenter si une élection partielle lui en donne l'occasion, mais il estime avoir des priorités beaucoup plus pressantes.

M. Paillé compte sillonner le Québec, aller à la rencontre de ses militants, bref, prendre son temps pour rebâtir le parti.

L'ancien chef Gilles Duceppe a fait valoir aux membres que le Bloc a combattu avec succès le Parti libéral du Canada et le Parti conservateur au fil des élections. Il lui faudra relever un nouveau défi, a-t-il dit.

«Le prochain chef doit démontrer que l'option du NPD n'est pas non plus une option aux yeux des Québécois», a-t-il déclaré.