Le Bloc québécois doit cesser d'être un parti de gauche qui aide à faire fonctionner la fédération canadienne, croit son aile jeunesse. Selon nos sources, le Forum Jeunesse a proposé ce sérieux coup de barre samedi lors du huis clos au conseil général du parti, à Drummondville.

Quelques jours plus tôt, son président, Simon-Pierre Savard-Tremblay, n'avait pas écarté de démissionner. Il a finalement réussi à présenter aux militants son rapport sur la débandade du parti aux dernières élections.

Joint hier par La Presse, M. Savard-Tremblay a simplement confirmé que le Bloc devait faire un « sérieux examen de conscience «. Il précise aussi vouloir rester en poste. « On espère qu'un maximum de candidats se présenteront pour la course à la direction, ajoute-t-il. Il faut un réel débat, avec des positions variées.»

La présidente par intérim du parti, Vivian Barbot, a également présenté à huis clos son analyse de la défaite du 2 mai. Selon une source qui était présente, elle a fourni des explications plus anecdotiques et circonstancielles, comme le choix du slogan ou la stratégie d'attaquer Jack Layton au débat des chefs. Elle a repris un élément de l'analyse de l'aile jeunesse en affirmant que le Bloc devait cesser de « jouer le jeu « du parlementarisme canadien. Mais elle n'a pas sérieusement remis en question les orientations du parti.

Le président du Forum jeunesse serait resté sur sa faim. Son analyse se rapprochait plutôt du rapport Alarie. Ce rapport interne prévenait déjà, en 2007, que le Bloc devenait un parti trop montréalais et à gauche, au risque de s'aliéner une partie des souverainistes. Il provoque encore un malaise au parti, nous explique-t-on.

Aux dernières élections, le Bloc a récolté moins du quart des votes, alors qu'environ 40% des Québécois se disent souverainistes. Le Forum jeunesse a demandé que le Bloc rompe avec sa culture syndicale et redevienne une coalition gauche-droite pour représenter tous les souverainistes. Le parti serait devenu si étroitement lié à ses alliés traditionnels - syndicats, associations étudiantes et artistes - qu'il a cédé au « clientélisme «, a dénoncé M. Savard-Tremblay samedi. Le Bloc confond les valeurs de ces groupes avec celles de l'ensemble des Québécois. Il devrait plutôt s'appliquer à rouvrir le débat sur l'identité nationale, « fermé depuis 2000 «, a argué M. Savard-Tremblay.

En promouvant des orientations de gauche à Ottawa, le Bloc encourage paradoxalement une plus grande intervention du gouvernement fédéral, a soutenu le Forum jeunesse. Par exemple, au lieu de défendre le registre des armes à feu, le Bloc aurait dû appuyer son abolition et demander à Québec de créer son propre programme.

On ne sait pas combien de membres le Forum jeunesse compte. Même le Forum lui-même l'ignore. Les autorités du parti gardent cette information confidentielle.

Au Bloc, le pouvoir était auparavant concentré au cabinet du chef Gilles Duceppe, rappelle notre source bien informée. Mais après la déconfiture aux dernières élections, le Bloc n'est plus un parti officiellement reconnu à Ottawa et il n'existe plus de cabinet en bonne et due forme. Les militants dissidents ne craignent plus d'élever la voix.