Encore sous le choc après avoir appris que Jack Layton devait mener une nouvelle bataille contre le cancer, les députés néo-démocrates se sont rangés, mardi, derrière la suggestion de leur chef de nommer Nycole Turmel à la tête du parti de manière intérimaire.

Lors d'une conférence de presse qui a pris la scène politique au dépourvu, Jack Layton a annoncé lundi après-midi qu'il quittait temporairement ses fonctions pour subir des traitements. Le chef, amaigri et la voix éraillée, a néanmoins assuré qu'il serait de retour dans deux mois, à temps pour la rentrée parlementaire en septembre.

Mais l'apparence physique du chef et surtout son silence entourant le type de cancer qui l'afflige laissent planer de nombreux doutes sur ses capacités à reprendre du service au moment espéré.

Le député néo-démocrate d'Acadie-Bathurst, Yvon Godin, a toutefois écarté d'emblée cette possibilité, affirmant même qu'il n'y avait «absolument pas» de plan B advenant un départ prolongé ou même définitif du chef. «C'est un pitbull. Quand il mord son os, il ne le lâche pas, il va gagner la bataille contre le cancer», a répété le néo-brunswickois, ajoutant que tout le reste demeurait hypothétique.

Conséquemment, la désignation de Mme Turmel ne semble donc être qu'une formalité pour les députés, d'autant plus, disent-ils, que cette dernière avait été nommée au printemps présidente du caucus national de l'opposition officielle.

«C'est juste par intérim, a laissé tomber M. Godin. C'est juste pendant la période de temps que M. Layton va prendre du repos, c'est la décision de Jack Layton et je le supporte.»

Comme ses collègues, la députée dans Laurier-Sainte-Marie, Hélène Laverdière, n'a pas voulu commenter la raison qui aurait poussé Jack Layton à ne pas suggérer le chef adjoint du parti, Thomas Mulcair, comme un aspirant au poste alors que plusieurs le pressentent comme un éventuel candidat à la direction du parti.

«On parle d'une situation bien spécifique et la présidente du caucus du NPD est vraiment appréciée de tous et elle est vraiment quelqu'un de très solide», a-t-elle tranché.

Le vice-président exécutif pour la région du Québec pour l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC), Jérôme Turcq a côtoyé de près Mme Turmel et croit que le choix de M. Layton est «judicieux».

Selon M. Turcq, celle qui a été la première femme à présider le syndicat pancanadien de 2000 à 2006, est aussi proche «de la base» que son chef.

«Mme Turmel n'a jamais eu d'attitude hautaine, c'est une personne ouverte envers tout le monde, probablement le parallèle parfait avec M. Layton, qui est vraiment un homme du peuple», a souligné son ancien collègue.

C'est le Conseil fédéral du NPD qui devrait officialiser jeudi la nomination de l'ancienne syndicaliste. Mais les députés feront d'abord leurs propres recommandations. Ils se réuniront mercredi matin à Ottawa.

Rentrée parlementaire

Par ailleurs, selon M. Godin, il est encore trop tôt, selon lui, pour dire si certains députés plus expérimentés auront un rôle particulier à jouer pendant la période de repos du chef. Selon M. Godin, même si le caucus néo-démocrate est composé de nombreux néophytes à la Chambre des communes, tous connaissent leurs dossiers dans le cabinet fantôme.

Le député de Sherbrooke, Pierre-Luc Dusseault, explique d'ailleurs être «très bien installé» dans sa circonscription et être entouré d'un bonne équipe qui l'aidera à préparer la rentrée parlementaire.  Âgé de 19 ans lors de l'élection du 2 mai dernier, il est le plus jeune député élu à Ottawa. Même s'il reconnaît que le départ du chef «change beaucoup de choses», il affirme toutefois que c'était plutôt M. Godin son mentor.

«Le chef, c'est certain que c'est un modèle pour nous mais ce n'est pas avec lui qu'on a eu le plus de contacts. Mais pour tout ce qui est logistique de bureau, des nouvelles fonctions de député, ce n'est pas nécessairement le chef qui prend le temps de voir tous les députés un à un», a-t-il expliqué, ajoutant qu'il parlait davantage à M. Layton lors des caucus.

M. Godin ne croit pas non plus que la confiance du public envers le NPD, qui a envoyé 59 députés du Québec à Ottawa, sera ébranlée en l'absence du chef. Selon lui, la population s'inquiète davantage de la santé de M. Layton que des aspects politiques de son retrait.

De son côté, le premier ministre du Canada, Stephen Harper, s'est dit attristé mardi d'apprendre que son adversaire politique luttait contre un nouveau cancer. M. Harper a affirmé que tout le pays était derrière M. Layton dans cette bataille et s'est néanmoins dit encouragé par son courage, son espoir et sa détermination.