Rarement une députée a-t-elle été propulsée aussi rapidement à l'avant-scène. En suggérant Nycole Turmel pour le remplacer à la tête du NPD, Jack Layton a offert le gouvernail du parti à une syndicaliste de carrière décrite comme sympathique mais capable d'être intraitable lorsque la situation l'exige.

«Elle possède l'expérience nécessaire pour assumer ces fonctions. Elle fera un excellent travail en tant que chef intérimaire du NPD», a dit Jack Layton en conférence de presse lundi.

Nycole Turmel, 69 ans, est peu connue du public et pour cause: sa carrière politique a réellement décollé le 2 mai au soir, quand la vague orange qui a déferlé sur le Québec lui a permis de ravir un château fort libéral. La circonscription de Hull-Aylmer, où elle a été élue, avait voté libéral depuis 1914.

La nouvelle chef intérimaire a passé la majeure partie de sa carrière dans le monde syndical, occupant de 2000 à 2006 la présidence du principal syndicat de la fonction publique fédérale. À l'Alliance de la fonction publique du Canada, elle a notamment mené d'intenses négociations avec le gouvernement concernant l'équité salariale.

«Mon plus grand défi sera de soutenir M. Layton pour qu'il puisse se concentrer sur sa santé, a-t-elle dit dans une rare entrevue accordée lundi, à la radio de CBC. Nous avons de nouveaux députés, c'est vrai, mais ce sont des gens super. Je les ai tous rencontrés et je sais qu'ils vont tout faire pour se préparer à la rentrée parlementaire.»

Mme Turmel a accordé cette entrevue peu de temps après l'annonce de sa nomination, qui devra être entérinée mercredi par le conseil fédéral du parti. Elle a ensuite décliné toute nouvelle demande d'entrevue, dont celle de La Presse, et s'est contentée d'envoyer un communiqué laconique.

Dans l'entretien de quelques minutes, elle insiste pour dire que son passage à la tête du parti ne sera que temporaire. «Je ne sais pas quand (Jack Layton) sera de retour. Il a dit à la télé qu'il reviendrait pour la rentrée à l'automne. Il va se concentrer sur ça et nous au parti allons l'aider à y parvenir.»

«Ce sera une difficile période pour le parti parce que M. Layton est un grand leader, a-t-elle continué en anglais. Mais nous avons une équipe solide avec M. Mulcair et les autres députés. Nous allons nous assurer que sa santé soit la priorité de M. Layton et on fera ce qu'il faut pour ça.»

La possible nomination de Mme Turmel à la tête du premier parti de l'opposition en a surpris plusieurs, qui voyaient en Thomas Mulcair un successeur potentiel. Mme Turmel n'a pas expliqué pourquoi on l'avait choisi plutôt que le député d'Outremont, indiquant qu'elle «n'avait pas posé la question».

Mais selon un ancien collègue de Mme Turmel, la nouvelle poiticienne a toutes les compétences pour tenir le fort. «J'ai travaillé pendant six ans sous les ordres de Nycole et je sais qu'elle sera à la hauteur», a dit lundi le président actuel de l'Alliance de la fonction publique du Canada, John Gordon.

Celui qui a succédé à Nycole Turmel à la tête du syndicat note qu'elle occupe déjà les fonctions de présidente du caucus national au NPD. «Il s'agit d'un poste très important», note-t-il.

«Elle comprend les enjeux rapidement, même les plus sensibles. Elle mène les dossiers avec prestance, a-t-il énuméré. C'est aussi une personne très gentille, mais qui peut être très ferme quand la situation l'exige.»

Selon lui, il s'agit d'un choix parfait pour ne pas multiplier les frictions au sein du caucus. «C'est une joueuse d'équipe, qui écoute les gens. Je suis certain qu'elle voit dans cette affectation un état très temporaire. Elle tient le fort en attendant le retour de Jack, comme il le promet, en septembre.»