La ministre fédérale du Travail, Lisa Raitt, s'est félicitée jeudi d'avoir facilité l'entente entre Air Canada et ses employés en grève grâce à la menace d'une loi de retour au travail.

Cette loi n'a finalement pas eu à être débattue ni adoptée mais là où se joue un autre conflit de travail, aux Postes, on l'étudiait de près jeudi après-midi pour y deviner ce que Mme Raitt a en réserve pour Postes Canada et ses 48 000 employés en lock-out depuis mercredi.

«Je sais que la menace d'une loi était un outil nécessaire», a dit la ministre Raitt quelques minutes après que les Travailleurs canadiens de l'automobile (TCA) et Air Canada aient annoncé qu'ils avaient conclu une entente de principe.

Le projet de loi spéciale qui devait forcer leur retour au travail est devenu caduc à la suite de cette entente, caduc mais pas inutile pour tous.

Au Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP), on l'analysait jeudi après-midi, en prêtant une attention toute particulière au principe directeur que la loi aurait imposé à l'arbitre qui aurait été nommé.

«Pour choisir l'offre finale, l'arbitre se fonde sur la nécessité de conditions de travail qui sont compatibles avec celles des transporteurs aériens comparables et qui fourniront à Air Canada la souplesse nécessaire à sa viabilité économique et à sa compétitivité à court et à long terme ainsi qu'à la viabilité de son régime de pension», peut-on y lire.

La question des pensions en est une qui achoppe tant, à Air Canada, que l'entente de principe ne la couvre pas. Il faudra la régler par arbitrage.

Le député néo-démocrate Yvon Godin voit dans le projet de loi avorté un avantage évident pour l'employeur.

«Ils disent que l'arbitre, faut qu'il aille voir ce qui est sur le marché. Sur le marché, c'est West Jet.  Et si on regarde la pension de West Jet (...) si l'arbitre va comparer, alors ça va être au désavantage des employés d'Air Canada», a soutenu M. Godin.

La ministre Raitt défend son projet de loi qu'elle qualifie de «très équilibré et très équitable». Et elle promet d'intervenir chaque fois qu'il y aura un «arrêt de travail prolongé» qui menace l'économie. Les grévistes d'Air Canada étaient sortis depuis quelques heures mardi lorsque la ministre a démarré le processus d'adoption d'une loi de retour au travail.

Lundi, la ministre compte déposer un projet de loi pour forcer la reprise du service à Postes Canada, à moins que les deux parties, là aussi, ne s'entendent auparavant.

Cette stratégie est dénoncée à l'unisson par l'opposition à Ottawa.

Les néo-démocrates y voient un parti pris évident pour les employeurs dans tout conflit de travail.  Et la rapidité avec laquelle le gouvernement conservateur est prêt à adopter ces lois spéciales lui attire aussi les foudres des libéraux.

Intervenant durant le débat relié à la loi spéciale qui visait Air Canada, débat qui n'a jamais abouti, le député libéral Stéphane Dion s'est inquiété ainsi: «La question fondamentale ici, c'est de se demander si le gouvernement ne croit pas que par définition, les droits des travailleurs au Canada sont une nuisance à l'économie.»