La taxe de vente du Québec (TVQ) bientôt à 10%?

Ce scénario désagréable pour le consommateur pourrait se concrétiser dès 2012, si Québec et Ottawa en arrivent à une entente sur l'harmonisation des taxes de vente fédérale et provinciale.

Le 1er janvier, la TVQ est passée de 7,5% à 8,5%, comme l'avait annoncé le gouvernement du Québec dans son dernier budget. Ce budget prévoyait aussi une autre augmentation de 1% en janvier 2012, ce qui portera la TVQ à 9,5%. Le gouvernement récupérera ainsi pleinement les 2% abandonnés par le fédéral sur la TPS.

Ce n'est pas tout: Québec s'étant engagé à cesser d'appliquer la TVQ à la valeur des achats augmentée de la TPS (ce que l'on appelle «taxer la taxe») lorsqu'une entente sera conclue avec Ottawa, il ajustera sa taxe en conséquence pour ne pas perdre les 717 millions de dollars que cette pratique lui rapporte annuellement (estimation du ministère des Finances pour 2011-2012).

Comme chaque point de pourcentage de TVQ rapporte environ 1,5 milliard au Trésor public, Québec devra hausser sa taxe de vente d'au moins 0,5% pour compenser ce manque à gagner.

Au cabinet du ministre Raymond Bachand, on affirme que l'impact de cette hausse sera «neutre» pour les consommateurs puisqu'ils payaient déjà cette somme. On ajoute que l'État québécois n'a tout simplement pas les moyens de se priver de plus de 700 millions par année.

«Le ministre Bachand a déjà laissé entendre que l'on ajustera la TVQ pour compenser le manque à gagner et l'impact sera neutre pour le consommateur puisqu'il ne verra pas de différence (par rapport à ce qu'il paye maintenant)» indique Catherine Poulin, porte-parole du ministre des Finances.

Une pratique contestée

La «neutralité» de la manoeuvre fiscale ne fera toutefois pas l'unanimité puisque la pratique de «taxer la taxe» est contestée au Québec depuis son entrée en vigueur, il y a 20 ans. Seule province à «taxer la taxe», Québec impose une surtaxe cachée depuis 1991. Lorsque l'on fait un achat de 100$, par exemple, on ne paie pas la TVQ sur 100$, comme pour la TPS, mais sur 105$ (100$ + 5% de TPS).

Au gouvernement, on reconnaît que cette pratique est douteuse, mais la hausse est néanmoins inévitable si l'on ne veut pas creuser un trou de plus de 700 millions dans des finances déjà mal en point. Dans les faits, la compensation prévue par Québec régularisera une pratique qui n'était pourtant pas tout à fait régulière. Québec veut bien cesser une pratique jugée injuste depuis 20 ans, mais il ne veut surtout pas se priver des revenus qu'elle lui procure.

Les péquistes opposés depuis 1991

Déjà en 1991, l'opposition péquiste avait condamné la «taxe sur la taxe» et accusé le gouvernement Bourassa d'»hypocrisie» envers les Québécois. L'ancien député péquiste Guy Chevrette s'était même lancé dans une attaque en règle, en mai 1991. Il avait reproché au gouvernement libéral «de ne pas être assez intelligent» pour taxer la somme initiale, d'être «hypocrite» et de «manquer de transparence».

«Quand on en est rendu à taxer la taxe... Les citoyens sont découragés et cela rapporte toujours plus de sous au gouvernement», avait dénoncé M. Chevrette. La pratique avait toutefois perduré sous les régimes péquistes, de 1994 à 2003, puis sous le régime Charest.

Si Québec et Ottawa signent d'ici à la fin de 2012 l'entente tant attendue sur l'harmonisation des taxes de vente, c'est donc dire que la TVQ pourrait augmenter de 2,5% en moins de 2 ans, une ponction de près de 4 milliards de dollars dans les poches des consommateurs québécois.

Après entente avec Ottawa, Québec perdra aussi la compensation de 130 millions que verse chaque année le fédéral pour la perception des deux taxes, une somme que la province pourrait être tentée de récupérer aussi.

Advenant une taxe de vente harmonisée à 15% (5% de TPS et 10% de TVQ), le Québec se retrouverait parmi les provinces les plus gourmandes. Les taxes harmonisées sont de 13% en Ontario (5% de TPS et 8% de TVO), de 12% en Colombie-Britannique et de 15% en Nouvelle-Écosse. Seule l'Alberta n'a pas de taxe de vente provinciale.