Le chef du NPD, Jack Layton croit que les gouvernements minoritaires sont devenus la norme au Canada et non plus l'exception à la règle. La raison? Le pays compte quatre partis politiques bien ancrés dans certaines régions et mais avec peu de racines ailleurs.

Les Canadiens vont s'habituer à cette nouvelle réalité politique, selon M. Layton. Et les partis politiques représentés à la Chambre des communes doivent prendre les devants en mettant de côté leurs attaques hautement partisanes qui caractérisent les débats, en particulier depuis 2006, afin de travailler davantage ensemble pour les intérêts supérieurs du pays, estime le chef du NPD.

M. Layton posera ce diagnostic de la nouvelle donne politique aujourd'hui à l'Université de Montréal dans le cadre d'un colloque intitulé «Gouverner sans majorité: quelles sont les conséquences pour les systèmes de Westminster?»

La Presse a obtenu hier des extraits de son discours.

Ce faisant, M. Layton deviendra le premier chef politique à concéder, avant même la prochaine campagne électorale, qu'aucun parti politique n'est en mesure de remporter une majorité des sièges aux Communes à court ou moyen terme. Ce constat du chef du NPD se veut aussi un appel aux autres formations à mettre de l'eau de leur vin.

«La politique canadienne a changé. Je crois que les gouvernements minoritaires sont devenus la norme au pays. C'est la réalité des dynamiques régionales que nous avons et d'un Parlement composé de quatre partis. Les partis politiques doivent accepter cette nouvelle réalité. Ils doivent apprendre à mieux travailler ensemble et à cesser de pourchasser une majorité illusoire», estime M. Layton dans le discours qu'il livrera devant les participants au colloque.

Depuis 2004, les Canadiens ont élu trois gouvernements minoritaires de suite - un premier formé par le Parti libéral et deux autres formés par le Parti conservateur. Tous les sondages indiquent que les Canadiens éliraient un autre gouvernement minoritaire si des élections avaient lieu aujourd'hui, aucun parti n'étant capable de franchir le cap des 40% des appuis à l'échelle du pays habituellement requis pour rafler une majorité des sièges aux Communes.

Encore hier, un sondage EKOS démontrait que le Parti conservateur et le Parti libéral étaient à égalité dans les intentions de vote. Les conservateurs obtiennent 29,4% des voix tandis que le Parti libéral récolte 28,6% et le NPD 19,3%. Au Québec, le Bloc se maintient en tête avec 37,2% contre 23% au Parti libéral, 15,7% au Parti conservateur et 11% au NPD. Ce sondage a été réalisé du 3 au 9 novembre derniers auprès de 1815 personnes et comporte une marge d'erreur de 2,3 points de pourcentage, 19 fois sur 20.

Au cours des derniers mois, le premier ministre Stephen Harper, à la tête d'un gouvernement minoritaire depuis février 2006, a affirmé qu'il demandera aux électeurs d'élire une majorité conservatrice au prochain scrutin afin de mettre fin à l'instabilité à Ottawa et à empêcher une coalition formée du Parti libéral et du NPD, et soutenue par le Bloc québécois, de prendre le pouvoir.

Selon M. Layton, les gouvernements minoritaires, par le passé, ont été des plus progressistes en adoptant des mesures sociales importantes comme l'assurance-maladie et le régime de pensions. Mais depuis 2006, l'atmosphère combative qui règne aux Communes fait en sorte que les partis politiques ont mis de côté tout effort de collaboration pour mieux s'attaquer.

«Pour faire fonctionner les Parlements dirigés par un gouvernement minoritaire, nous devons établir de meilleures relations entre les partis politiques et mettre fin aux attaques personnelles», estime M. Layton. Le chef du NPD rappelle qu'il avait été en mesure de travailler avec le gouvernement minoritaire de Paul Martin lorsque le NPD a appuyé le budget de 2005 en retour d'investissements dans les programmes sociaux totalisant 4,8 milliards de dollars. Mais depuis l'arrivée des conservateurs au pouvoir, il est plus difficile de travailler avec le gouvernement, selon lui.