Comme il l'avait annoncé dans son discours du Trône de mars dernier, le gouvernement Harper a proposé mardi de nouvelles règles visant à simplifier les mégaprocès impliquant plusieurs accusés, qui deviennent de plus en plus courants au pays.

Pour le ministre fédéral de la Justice, Rob Nicholson, ces mégaprocès mettent en péril l'un des grands principes du système judiciaire canadien, celui d'un procès tenu dans un délai raisonnable. Ils augmenteraient également le risque d'annulation de procès, selon le ministre.

La question de la gestion de tels procès a été le sujet de nombreux rapports et études au sein de la communauté juridique canadienne au cours de la dernière décennie.

Au Québec, les avocats se creusent la tête pour gérer la logistique derrière les dossiers de plus de 100 membres des gangs de motards criminels et de leurs acolytes, qui devraient être jugés l'an prochain. Cette cause, considérée comme l'une des plus importantes de l'histoire du Québec et du Canada, pourraient voir une soixantaine d'affaires jugées en même temps.

Le projet de loi du gouvernement conservateur, déposé mardi aux Communes, prévoit la nomination d'un second juge qui serait responsable de gérer tout le processus des mégaprocès. Ce «juge de gestion de l'instance» s'occuperait par exemple des requêtes d'avant-procès et pourrait imposer des dates butoirs pour les procédures. Il pourrait également s'occuper des questions relatives à la Charte canadienne des droits et libertés et à la divulgation d'informations.

Ottawa propose aussi de nouvelles règles pour limiter la duplication, afin d'éviter que les avocats ne répètent les mêmes arguments. On propose enfin la nomination de 14 jurés plutôt que 12, pour s'assurer qu'après des mois de procédures, il en resterait quand même 10 qui puissent rendre un verdict.

Les nouvelles règles permettraient aussi de protéger davantage l'identité des jurés - et réduire le risque qu'ils soient manipulés ou intimidés.

«Le crime organisé a le bras très long et pourrait avoir une influence sur ces gens à l'extérieur de la cour, voilà donc pourquoi il est important de protéger leur identité», a indiqué Jean-Guy Gagnon, chef adjoint au Service de police de la ville de Montréal, qui a pris part à plusieurs enquêtes majeures.

Ces procès sont longs et traitent d'affaires sérieuses - crime organisé, crimes violents et terrorisme. Il y a souvent de nombreux accusés, plusieurs témoins, des preuves complexes et des dizaines d'avocats, ce qui fait en sorte que ces affaires traînent pendant des mois ou des années avant de franchir tout le processus judiciaire.

Ces procès sont également très coûteux - nécessitant généralement des millions de dollars en frais judiciaires et impliquant des tribunaux spéciaux construits ou agrandis pour l'occasion.