Le gouvernement Harper se défend de vouloir refouler à la frontière des réfugiés légitimes avec les mesures annoncées hier pour lutter contre les passeurs d'immigrants clandestins.

Le ministre de la Sécurité publique, Vic Toews, et son collègue de l'Immigration, Jason Kenney, ont expliqué hier, dans le port de Vancouver, que le projet de loi vise à faire échec aux trafiquants qui tentent d'exploiter le système d'immigration canadien.

Parmi les mesures proposées, on veut faciliter les poursuites contre les passeurs d'immigrants illégaux, qui s'exposeraient à au moins 10 ans de prison s'ils sont reconnus coupables d'avoir fait entrer au pays plus de 50 étrangers; on veut aussi forcer les propriétaires de navire à rendre des comptes s'ils permettent à des individus d'utiliser leur bateau pour faciliter le trafic d'êtres humains.

En outre, le gouvernement Harper compte rendre obligatoire la détention des migrants illégaux pendant une période pouvant aller jusqu'à un an afin de permettre aux autorités de confirmer leur identité et d'établir s'ils représentent un risque pour la sécurité nationale.

De plus, on fera en sorte que «les personnes qui entrent illégalement au Canada grâce à des opérations de passage de clandestins ne reçoivent pas des soins de santé supérieurs à ceux offerts aux Canadiens».

Les migrants illégaux n'auraient pas le droit de parrainer des membres de leur famille pendant au moins cinq ans, et ceux qui obtiennent le statut de réfugié feraient l'objet d'une nouvelle évaluation au bout de cinq ans afin de déterminer s'ils ont toujours besoin de protection ou s'ils peuvent être renvoyés dans leur pays d'origine.

Enfin, le projet de loi donnerait au ministre de la Sécurité publique le pouvoir de déterminer si l'arrivée d'un migrant au pays est «irrégulière» et doit faire l'objet d'un traitement plus sévère.

«Les mesures annoncées aujourd'hui envoient un message clair aux individus qui, à l'étranger, envisagent de faire passer clandestinement des personnes au Canada et à ceux qui prévoient avoir recours aux passeurs: Ne faites pas cela», a affirmé le ministre Kenney. «Il faut empêcher les passeurs d'exploiter notre système d'immigration tout en continuant d'offrir protection aux personnes les plus vulnérables du monde», a ajouté le ministre.

L'offensive du gouvernement Harper survient deux mois après l'arrivée à Vancouver de quelque 500 ressortissants tamouls du Sri Lanka à bord du cargo MV Sun Sea, après quatre mois de voyage dans des conditions difficiles.

Les partis de l'opposition estiment que ces mesures trop sévères et malavisées. Selon le Parti libéral, le gouvernement rate la cible en s'attaquant aux nouveaux arrivants plutôt qu'aux responsables du trafic d'êtres humains. Le député libéral Justin Trudeau croit même que le projet de loi pourrait contrevenir à la Charte des droits et libertés en créant deux classes d'immigrants.

Le NPD, lui, croit que le projet de loi risque de pénaliser injustement des réfugiés légitimes et des travailleurs humanitaires tout en étant inutile pour condamner les escrocs. «Ce projet de loi n'arrêtera pas les criminels. Sans le témoignage des victimes, il est presque impossible de condamner les trafiquants, les passeurs et les consultants corrompus», a soutenu la députée Olivia Chow.