Les libéraux de Michael Ignatieff ont fait leur choix: ils veulent que la prochaine campagne électorale soit un référendum sur les baisses d'impôt accordées aux entreprises par le gouvernement Harper alors qu'Ottawa nage en plein déficit.

Si les libéraux remportent les prochaines élections, qui pourraient avoir lieu au printemps, ils annuleront carrément la réduction des impôts des entreprises qui doivent passer de 18% à 16,5% le 1er janvier 2011 avant d'être ramenés à 15% le 1er janvier 2012. À terme, ces deux réductions priveront le trésor fédéral de six milliards de dollars par année en revenus.

Le Parti libéral croit qu'il est plus avisé d'utiliser cette somme d'argent pour financer de nouveaux programmes et réduire le déficit. Michael Ignatieff a d'ailleurs annoncé mardi qu'un futur gouvernement libéral mettra sur pied un programme plus généreux pour donner un coup de pouce à ceux qui doivent prendre congé pour venir en aide à des proches gravement malades.

«La prochaine campagne électorale ne sera ni plus ni moins qu'un référendum sur le plan des conservateurs d'accorder de nouvelles baisses d'impôts aux grandes entreprises. Les électeurs auront à choisir entre un parti qui veut soutenir les familles canadiennes et un autre qui a de mauvaises priorités en accordant des baisses d'impôts aux entreprises», a confié à La Presse un stratège libéral sous le couvert de l'anonymat.

Le chef libéral a décidé d'aller de l'avant avec cette promesse audacieuse après avoir entendu de nombreuses critiques au sujet des nouvelles baisses d'impôts dans le cadre de sa tournée estivale du pays.

Le PLC veut se démarquer

À quelques mois d'un prochain scrutin, les libéraux de Michael Ignatieff multiplient donc les gestes pour se démarquer des conservateurs de Stephen Harper.

Outre l'annulation des baisses d'impôts des entreprises, le Parti libéral s'engage à suspendre le contrat controversé de 9 milliards de dollars pour acheter 65 avions de chasse F-35 accordé par le gouvernement conservateur à la firme américaine Lockheed Martin. Il s'engage aussi à maintenir le registre des armes à feu dans son intégralité alors que les conservateurs veulent éliminer l'obligation d'enregistrer les armes d'épaule.

«Le taux d'imposition des entreprises doit être gelé à 18%. Quand nous aurons un budget équilibré, nous allons pouvoir réduire à nouveau les taxes des entreprises. Mais pas avant. On ne peut pas emprunter 6 milliards de dollars pour accorder des baisses d'impôts à des entreprises quand on a un déficit de 54 milliards de dollars», a déclaré Michael Ignatieff.

Aidants naturels

Le chef libéral s'est rendu mardi chez un couple de Gatineau qui doit composer avec la maladie afin d'annoncer les grandes lignes du nouveau programme libéral pour les aidants naturels. Michael Lemieux est atteint du cancer et sa femme, Hélène Hardy, doit s'absenter de son travail pour prendre soin de lui. Cela les force à puiser dans leurs économies pour joindre les deux bouts.

Le plan libéral coûterait 1 milliard de dollars et consisterait à instaurer une nouvelle prestation d'assurance-emploi de six mois pour les soins familiaux, semblable à la prestation d'assurance-emploi pour le congé parental, afin de permettre à plus de Canadiens de fournir à domicile des soins aux membres de leur famille atteints de maladie grave sans devoir quitter leur emploi. À l'heure actuelle, les aidants naturels peuvent obtenir «un congé de compassion» de six semaines de prestations d'assurance-emploi.

Le plan libéral prévoit aussi une nouvelle prestation fiscale pour soins familiaux pouvant atteindre jusqu'à 1350 $ par année pour les aidants naturels de familles à faible ou à revenu moyen.

«Nous vivons à une époque difficile au niveau économique, ce qui veut dire que les gouvernements ainsi que les Canadiens doivent faire des choix. Stephen Harper et les conservateurs choisissent de donner des allégements fiscaux aux grandes entreprises. Nous choisissons d'aider les familles canadiennes», a affirmé M. Ignatieff.

Recyclage

Aux Communes, mardi, le premier ministre Stephen Harper a soutenu que M. Ignatieff n'a fait que recycler une vieille promesse des libéraux.

«Pour la cinquième fois, le Parti libéral a recyclé la promesse de donner des soins à domicile pour les gens. Chaque fois, ils ont dit qu'ils paieraient cela par des hausses des primes de l'assurance-emploi et des hausses d'impôts pour les compagnies qui créent des emplois. Chaque fois, ils n'ont jamais livré les soins à domicile, mais ils ont livré les hausses de taxes et d'impôts», a affirmé M. Harper.

Le NPD s'est aussi montré sceptique sur les intentions des libéraux. «Foutaise et balivernes! Ils ne sont pas crédibles sur cette question. (...) Il faut quand même que les bottines suivent les babines!» a dit le député néo-démocrate Thomas Mulcair en rappelant les promesses des libéraux qui sont restées lettre morte par le passé sur les soins à domicile.