Le ministre des Ressources naturelles Christian Paradis a affirmé lundi qu'il ignorait que son ancien conseiller politique serait intervenu à quelques reprises pour empêcher la divulgation de documents dans le cadre de demandes d'accès à l'information.

Il avait d'abord été révélé que Sébastien Togneri avait retenu la transmission de documents à La Presse Canadienne à l'été 2009.

Une erreur, mais une seule, avait-il expliqué lors de sa comparution devant un comité des Communes plus tôt cette année.

Mais des documents de ce même comité, dévoilés jeudi dernier, démontrent que Sébastien Togneri s'est mêlé de trois autres demandes d'accès à l'information. Il aurait requis que soient retenus des documents devant être transmis à des journalistes et aurait aussi demandé que des portions soient biffées.

M. Togneri a démissionné le jour même de ces révélations.

Loin d'avoir ordonné ces interventions de son conseiller politique, M. Paradis a affirmé, lundi, qu'il ignorait tout de cette histoire.

«J'ai appris les incidents, l'existence des incidents comme tout le monde jeudi soir et c'est pourquoi j'ai accepté la démission de M. Togneri», a martelé M. Paradis, lundi.

Plus encore, le ministre a affirmé avoir questionné son ancien conseiller - peu après sa première tentative d'empêcher la transmission de documents - afin de savoir s'il était aussi intervenu dans d'autres dossiers.

«Moi j'ai demandé à M. Togneri. Il m'a dit que c'était le seul incident. Il a témoigné à cet effet-là», s'est justifié M. Paradis.

Les partis d'opposition ont continué à réclamer la démission du ministre Paradis, lundi. Selon eux, il doit prendre la responsabilité des actes de son employé.

Le ministre a répété avoir agi adéquatement dans les circonstances en acceptant la démission de Sébastien Togneri jeudi et en référant promptement toute cette affaire pour enquête à la commissaire à l'information du Canada.

Mais les courriels dévoilés par le comité des Communes suggèrent que deux autres employés politiques de Christian Paradis seraient possiblement impliqués dans la revue des demandes d'accès à l'information.

Des courriels transmis par M. Togneri renvoient des fonctionnaires responsables du traitement de demandes d'accès à Jillian Andrews et à Marc Toupin s'ils ont besoin de plus d'information.

Les courriels n'indiquent cependant pas ce qui s'est passé après que M. Togneri les ait écrits, ni si les employés en question sont intervenus.

Refusant de répondre directement aux questions au sujet de ces deux employés, M. Paradis a soutenu que ce n'est pas à lui de déterminer ce qui s'est passé au sein du ministère des Travaux publics, dont il était responsable au moment des événements.

Et que c'est la commissaire à l'information du Canada - l'autorité compétente en la matière, selon lui - qui allait faire enquête sur toute l'affaire.

Que M. Paradis ait été au courant ou non des actes de M. Togneri importe peu, selon le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe.

Rappelant que les conservateurs ont instauré une nouvelle politique le printemps dernier selon laquelle les ministres allaient dorénavant témoigner à la place de leurs employés devant les comités parlementaires «parce qu'ils sont responsables d'eux», M. Duceppe estime que M. Paradis ne peut pas se cacher derrière M. Togneri.

«C'est inacceptable que le ministre nous disait qu'il témoignait à la place de son employé parce qu'il était totalement responsable, mais quand on est totalement responsable, on assume toutes les responsabilités. Ça, ça veut dire démissionner», a lancé M. Duceppe.

Le ministre Paradis n'est pas d'accord avec cette interprétation de la «responsabilité ministérielle».

«Je pense qu'un ministre ne peut pas répondre des actes de tout le monde à proprement parler», a-t-il indiqué.

Quant au néo-démocrate Pat Martin, il ne pense pas que le ministre ait les mains propres dans cette histoire.

«Personne ne croit pour une seconde que c'est ce jeune adjoint (Sébastien Togneri) qui a unilatéralement et arbitrairement décidé de défier la Loi sur l'accès à l'information. Nous croyons que les ordres venaient du ministre», a lancé M. Martin.

Il n'a pas manqué de relever, comme le député libéral Denis Coderre, que l'un des dossiers que M. Togneri a tenté de bloquer portait sur l'amiante, un sujet controversé mais aussi une industrie importante dans la circonscription du ministre Paradis, où est située la ville de Thetford Mines.

«Il a été découvert. C'en est fini de Paradis. Il n'a qu'une option: de démissionner», a conclu M. Martin.