«C'est la philosophie même du système (de justice) qu'on veut changer», a dit hier matin le sénateur conservateur Pierre-Hugues Boisvenu en dévoilant le nouveau projet de loi du gouvernement Harper. Il vise à «responsabiliser» les délinquants et à abolir le processus d'examen expéditif (PEE) pour les libérations conditionnelles.

Actuellement, tout délinquant qui a commis un crime non violent et qui est incarcéré pour la première fois peut bénéficier du PEE. S'il n'est pas jugé dangereux pour la société, on lui accorde une semi-liberté au sixième de sa peine et la liberté conditionnelle lorsqu'il a purgé le tiers de la peine. La décision se prend sur étude de dossier, sans audience avec le détenu.Renverser le fardeau de la preuve

Avec le projet de loi, c'est le détenu qui devrait prouver qu'il mérite la libération. «On dit au criminel: on ne peut plus te donner tous les droits. (...) Voici maintenant les règles du jeu. Si tu penses que tu es réhabilité, tu dois faire la preuve qu'on peut te libérer. On veut retourner la responsabilité», a expliqué le sénateur Boisvenu, qui a fait l'annonce au nom du ministre de la Sécurité publique, Vic Toews. Ce nouveau projet de loi est en fait le résultat de la fusion de deux anciens projets de loi, le C-43 et le C-53, déposés l'an dernier. Tous deux étaient morts au feuilleton.

M. Boisvenu déplore que la moitié des détenus ne participent pas aux programmes de réhabilitation et de réinsertion, dans lesquels le gouvernement investirait 2,5 milliards de dollars par année.

«La population veut que les peines correspondent à la gravité des crimes commis et que les droits des victimes aient préséance sur les droits des criminels», a dit le sénateur.

Le projet conservateur propose aussi que les victimes participent aux audiences sur la libération conditionnelle et qu'elles sachent si les détenus participent aux programmes de réhabilitation ou s'ils commettent des infractions disciplinaires graves en prison.

Il permettrait également aux policiers d'arrêter sans mandat un délinquant soupçonné d'avoir enfreint ses conditions de mise en liberté. Le nombre de commissaires à temps plein aux libérations conditionnelles passerait de 45 à 60.

M. Boisvenu souhaite que le projet de loi soit adopté «tôt en automne, en octobre ou novembre». Il a bon espoir que l'opposition vote pour. «Je crois que le Bloc devrait l'appuyer. Le Bloc avait déjà déposé un projet de loi pour mettre fin aux libérations automatiques après le sixième de la peine pour les crimes à caractère financier.»