La tentative de réforme du Sénat entreprise par le gouvernement Harper se fait écorcher de l'intérieur.

Le sénateur conservateur québécois Pierre Claude Nolin s'oppose au projet de loi de son gouvernement qui prévoit l'élection des sénateurs. Et il dit que plusieurs de ses collègues conservateurs au Sénat lui ont manifesté discrètement leur appui.

Le sénateur Nolin a détaillé sa position dans un discours au Sénat, mercredi après-midi, assurant qu'elle ne devrait pas surprendre le premier ministre Stephen Harper.

Le projet de loi S-8 obligerait un premier ministre, lorsque vient le temps de nommer un sénateur, à prendre en considération les noms sur une liste de candidats élus présentée par les provinces qui tiennent un processus de consultation.

«Je pense qu'il est inapproprié de procéder de la sorte», a déclaré le sénateur conservateur dans la Chambre où les applaudissements des libéraux ont ponctué son discours.

«Une élection, c'est un choix populaire, a-t-il poursuivi. Je prétends que cette Chambre doit être composée, si possible, de gens populaires mais, surtout, de gens compétents.»

Pour appuyer son argument, il a fait valoir qu'il y aurait moins de femmes, moins d'autochtones et moins de francophones de l'extérieur du Québec dans un Sénat élu.

Manifestement content de sa sortie remarquée, le sénateur Nolin disait, plus tard, en entrevue à La Presse Canadienne, qu'il ne faut pas lire dans sa prise de position ce qui n'y est pas.

«Il faut lire que je prends très à coeur mon rôle de sénateur et mon rôle comme sénateur m'impose une certaine réserve partisane, et c'est ce que j'essaie d'exercer dans l'intérêt de l'institution que je sers», a-t-il dit.

«Si on est pieds et poings liés et on doit, parce que nos patrons politiques nous disent «vous devez», ça ne donne rien d'avoir un Sénat», a-t-il fait valoir.

Est-il encore à l'aise avec ses patrons politiques? «Très. J'étais conservateur avant eux, puis peut-être que je le serai après eux», a-t-il dit tout sourire.

Le sénateur Nolin va aussi à l'encontre de son gouvernement dans un autre dossier: il appuie le projet de loi qui imposerait le bilinguisme aux juges de la Cour suprême.

Ils sont 51 conservateurs, 48 libéraux et quatre indépendants à siéger au Sénat en ce moment. Stephen Harper ne peut donc pas se permettre d'avoir trop de sénateurs qui en font à leur tête.

Le sénateur Nolin raconte qu'après son discours, plusieurs de ses collègues de son côté de la Chambre haute lui ont écrit ou l'ont approché pour lui dire: «je n'ai pas applaudi mais je suis d'accord avec toi».