Bien qu'il dise comprendre et «respecter» la décision du gouvernement canadien d'exiger un visa des visiteurs mexicains, le président du Mexique, Felipe Calderón, a vivement déploré, jeudi, cette entrave à la relation privilégiée entre les deux pays.

«Des centaines de milliers de touristes mexicains visitaient autrefois le Canada chaque année. Ce nombre a chuté de 40% dans les 12 derniers mois», a déploré le président Calderón dans une allocution prononcée à la Chambre des communes.

Au mois de juillet dernier, Ottawa a décrété que les ressortissants mexicains désireux de venir au Canada devraient préalablement obtenir un visa. Le gouvernement canadien souhaitait ainsi freiner la hausse, vertigineuse depuis quelques années, des demandes d'asile en provenance de ce pays jugé démocratique.

«En abusant de la générosité de la population canadienne, certains ont perverti l'objectif noble du système d'asile, ce qui a mené le gouvernement canadien à imposer des visas», a dit le chef d'État mexicain.

«Je ne peux m'empêcher de vous exprimer nos regrets à l'égard de ces incidents et de cette décision», a-t-il ajouté.

Le président Calderón a assuré le premier ministre canadien, Stephen Harper, de sa volonté de collaborer pour trouver une solution au problème et «mettre cette mesure temporaire derrière nous».

La réponse du gouvernement ne s'est pas fait attendre: la levée de la restriction prendra du temps - au minimum un an, le temps de réformer le système des demandes d'asile.

«On doit faire adopter d'abord le projet de loi, et puis on doit le mettre en application, a expliqué le premier ministre Harper, en point de presse. L'imposition d'un visa implique des coûts réels pour le Canada. Mais c'est le seul outil que nous avons en ce moment pour régler le problème des fausses demandes.»

Le ministre de l'Immigration, Jason Kenney, a pour sa part exprimé le voeu que son projet de loi visant à modifier le régime des demandeurs d'asile soit adopté avant les vacances estivales.

«Aucun gouvernement responsable ne peut éliminer le visa pour le Mexique avant une réforme du système d'asile», a souligné M. Kenney. Il a rappelé que, depuis cette restriction, les demandes de ressortissants mexicains ont diminué de 90%, ce qui justifie la mesure, selon lui, et aurait permis au gouvernement d'économiser 400 millions de dollars.

«L'industrie touristique du Canada a perdu 100 millions de dollars depuis l'imposition d'un visa aux Mexicains, a toutefois critiqué la députée du NPD, Olivia Chow. On perd des dizaines de milliers de visiteurs. C'est mauvais pour les Canadiens, pour l'économie canadienne, et c'est désastreux pour l'amitié entre le Canada et le Mexique. Il faut que cette exigence cesse dès aujourd'hui.»

«On ne peut plus attendre»

Sur la question des changements climatiques, le président Calderón a appelé la communauté internationale, en particulier des pays développés, à agir rapidement.

«Le monde ne peut plus attendre. Tous les jours, l'environnement se dégrade de plus en plus gravement», a souligné le chef d'État, qui a évoqué les inondations meurtrières de 2007, au Mexique, qui ont été suivies par l'une des pires sécheresses de l'histoire du pays.

«On ne peut pas attendre les décisions des pays développés, a-t-il dit. Il y en a qui attendent extrêmement longtemps avant de prendre une décision. On ne peut pas se permettre cela. La qualité de vie d'une grande partie de l'humanité dépend d'une action rapide.»

Il a rappelé que le Mexique a été le premier pays en développement à implanter une stratégie nationale de lutte contre les changements climatiques et le premier à établir des objectifs précis de réduction des gaz à effet de serre.

Le président Calderón et le premier ministre Harper se sont promis d'accroître les échanges économiques entre leurs deux pays, qui ont déjà quintuplé depuis l'entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange nord-américain, en 1994.

Le président Calderón, en visite officielle pour deux jours, se rendra vendredi à Toronto et à Montréal.