Ottawa jongle avec l'idée d'imposer un visa aux ressortissants slovaques en visite au Canada, à l'instar des Tchèques et des Mexicains.

Selon des documents qu'a obtenus La Presse, grâce à la loi d'accès à l'information, l'augmentation du nombre de demandeurs d'asile en provenance de la Slovaquie force le gouvernement canadien à «surveiller» la situation de près.

«Les pays dispensés de l'obligation du visa savent que s'ils ne respectent pas les conditions du Canada relativement à la dispense de visa, le Canada pourrait réimposer l'obligation du visa», met en garde une note d'information, datée du 18 février dernier, et intitulée «Imposition du visa aux citoyens de la Slovaquie».

En juin 2009, une note d'information du même type, provenant aussi du ministère de l'Immigration et de la Citoyenneté, soulignait l'inquiétude grandissante du gouvernement canadien face à l'augmentation importante du nombre de demandes d'asile en provenance de la République tchèque, révèlent les documents obtenus.

Quelques semaines plus tard, à la mi-juillet, Ottawa est allé de l'avant en imposant des visas aux voyageurs tchèques et mexicains, afin de freiner l'explosion du nombre de demandes d'asile constatée dans les dernières années. L'imposition de visas a fait grand bruit dans les deux pays concernés, et soulevé des critiques dans les milieux diplomatiques et touristiques. La République tchèque est allée jusqu'à rappeler son ambassadeur au Canada.

«La Slovaquie a été le seul pays de l'Union européenne à critiquer publiquement la décision du Canada d'imposer un visa à la République tchèque», précise la note d'information du Ministère.

Les touristes slovaques n'ont plus besoin de visa pour entrer au Canada depuis le 1er mars 2008, ayant été exemptés par Ottawa en même temps que les ressortissants de la Hongrie, de la Lituanie et de la Pologne.

Mais, depuis cette date, les demandes d'asile de citoyens slovaques au Canada ont augmenté sensiblement, passant de 74 en 2008 à 355 requêtes déposées en 2009, ce qui représente un peu plus de 1 % du nombre total de demandes faites au pays. En comparaison, plus de 2000 citoyens tchèques ont demandé l'asile au Canada l'année dernière, dont beaucoup de Roms, qui affirment être persécutés dans leur pays.

Parmi les conditions à respecter, le gouvernement fédéral se garde le droit de réviser une exemption de visa si le nombre de demandes d'asile en provenance d'un pays en question vient à atteindre 2 % du nombre total de requêtes reçues en une année par le Canada.

Au Ministère, on rétorque simplement qu'il n'y a pas «actuellement» de plan pour imposer un visa à la Slovaquie.

Jugeant le système de demandes d'asiles déficient, le ministre de l'Immigration et de la Citoyenneté, Jason Kenney, a présenté la semaine dernière un vaste projet de réforme du processus d'accueil des réfugiés.

Le nombre élevé de demandes d'asile provenant de pays jugés «sûrs», c'est-à-dire reconnus comme démocratiques et respectueux des droits de la personne, ainsi que l'abandon d'un grand nombre de requêtes en provenance de ces mêmes pays ont amené Ottawa à croire que certains profitent des lacunes du système pour immigrer au Canada «par la porte d'en arrière».

«Certaines personnes abusent de notre générosité et bon nombre de demandeurs d'asile qui viennent au pays n'ont pas besoin de notre protection», a souligné le ministre Kenney en présentant sa réforme, la semaine dernière.

- Avec William Leclerc