Face au refus du gouvernement fédéral d'indiquer s'il a l'intention ou non de respecter la décision prochaine de la Cour suprême du Canada quant au rapatriement d'Omar Khadr, les partis d'opposition ont accusé les conservateurs de préparer le terrain à l'éventualité qu'ils continuent d'ignorer l'ordre des tribunaux de ramener le jeune Canadien au pays.

Les libéraux s'en sont pris aux troupes de Stephen Harper, à la Chambre des communes lundi, en leur demandant d'assurer qu'elles respecteront la décision du plus haut tribunal, dans le cas où celui-ci maintiendrait deux jugements précédents qui ordonnaient au gouvernement de ramener le jeune homme au pays.

Après avoir porté sans succès la décision de la Cour fédérale en appel, le gouvernement conservateur a porté la cause devant la Cour suprême, qui tenait ses audiences vendredi.

Les troupes du premier ministre Harper se font demander, depuis, si leur gouvernement a l'intention de respecter la décision de la cour, quelle qu'elle soit.

Le ministre de la Défense, Peter MacKay, n'a pas répondu directement à la question du libéral Bob Rae en ce sens. Il a toutefois fait valoir, à l'instar des propos tenus par son parti vendredi, qu'il s'agissait d'une décision d'affaires étrangères qui relève du gouvernement, et non de la cour.

«Nous avons toujours maintenu, et nous continuons de le faire devant les tribunaux, que ce domaine de compétence relève du gouvernement démocratiquement élu du Canada et non des tribunaux», a répliqué le ministre MacKay aux attaques de M. Rae.

Même s'ils refusent de s'engager formellement à écouter la Cour suprême, les conservateurs nient néanmoins qu'ils laissent la porte ouverte à la possibilité d'ignorer un troisième ordre de rapatrier Omar Khadr.

Mais le député conservateur Steven Blaney a lui aussi repris les propos de ses collègues, soulignant à quelques reprises, en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne, qu'à «chacun son métier».

«Mais il est absolument prématuré d'évaluer une réaction du gouvernement à une décision hypothétique de la Cour suprême», a-t-il argué.

Accusé d'avoir tué un soldat américain en Afghanistan, en 2002, Omar Khadr, qui était alors âgé de 15 ans, est depuis emprisonné à la prison militaire de Guantanamo Bay. Il y a été soumis à des traitements considérés comme de la torture en vertu du droit international. On l'aurait battu, maintenu en situation d'isolement et empêché de dormir en l'obligeant fréquemment à changer de cellule.

M. Rae a d'autre part également dénoncé le fait qu'Ottawa refuse de ramener le jeune Khadr au pays afin qu'il soit jugé par un tribunal canadien, plutôt que par une commission militaire américaine, car on y refuse de reconnaître son statut d'enfant soldat.

Du côté du Nouveau Parti démocratique (NPD), le porte-parole en matière d'affaires étrangères, Paul Dewar, a quant à lui été catégorique, à sa sortie des Communes, et n'a pas hésité à accuser le fédéral de mener une campagne pour préparer le pays à son refus d'écouter le tribunal.

«Je pense qu'ils préparent absolument le terrain pour ignorer la Cour suprême. Et c'est une question constitutionnelle et un peu une crise quand le gouvernement fédéral décide qu'il va ignorer la Cour suprême du Canada en se basant sur, selon moi, de la pure politique (partisane)», a lancé M. Dewar.