Les conservateurs ne pourront bientôt plus dénoncer le Sénat parce que le Parti libéral y détient la majorité. En effet, à partir du 2 janvier, les troupes de Stephen Harper disposeront de plus de sièges que les libéraux à la Chambre haute si tous les postes vacants y sont comblés.

S'il le veut, le gouvernement Harper pourra avoir le dessus sur les libéraux au Sénat plus tôt que prévu, à la suite de la démission inattendue, le mois dernier, du sénateur libéral du Nouveau-Brunswick, John Bryden, âgé de 72 ans. M. Bryden aurait pu siéger trois ans de plus avant de prendre sa retraite obligatoire, mais il a choisi de partir pour des raisons familiales.

 

À l'heure actuelle, il y a 51 sénateurs libéraux, 46 conservateurs, trois indépendants, deux progressistes-conservateurs, un sans affiliation et deux postes vacants.

Trois sénateurs doivent prendre leur retraite d'ici le 2 janvier. Il s'agit du sénateur indépendant Marcel Prud'homme (30 novembre), de la sénatrice Lorna Milne (13 décembre) et du sénateur libéral Jerahmiel Grafstein (2 janvier 2010).

Stephen Harper pourra donc nommer cinq nouveaux conservateurs, au début de la nouvelle année, afin de donner à son parti le plus grand nombre de sièges au Sénat. Après avoir refusé de combler les vacances au Sénat pendant trois ans, M. Harper a nommé au cours des 12 derniers mois 27 sénateurs conservateurs.

Fini les critiques

Selon le chef de l'opposition au Sénat, le sénateur libéral James Cowan, les ministres du gouvernement Harper, notamment le ministre de la Justice Rob Nicholson, ne pourront plus critiquer le Sénat de manière partisane, à partir de l'an prochain, parce que les conservateurs pourront y être majoritaires.

Au cours des derniers mois, M. Nicholson a souvent reproché aux sénateurs libéraux de retarder l'adoption des projets de loi visant à imposer des peines plus sévères aux criminels. Mais les faits démontrent au contraire que dans plusieurs cas, le Sénat a adopté les projets de loi plus rapidement que la Chambre des communes.

«Le temps joue en faveur des conservateurs, évidemment. Ils vont avoir plus de sièges que les libéraux si M. Harper continue à nommer des sénateurs. Ils devront tout de même composer avec les sénateurs indépendants», a dit M. Cowan.

Le gouvernement Harper a aussi proposé depuis son arrivée au pouvoir de réformer le Sénat en présentant deux projets de loi, l'un limitant à huit ans le mandat des sénateurs, et l'autre stipulant que les sénateurs devraient être élus dans les provinces où il y a un poste vacant. Ces projets n'ont pas encore été adoptés.

Le Québec s'oppose farouchement à ces mesures, estimant que cela nécessite un amendement constitutionnel et le consentement de sept provinces représentant au moins 50% de la population.

À cet égard, le sénateur Cowan estime que le gouvernement Harper doit soumettre les réformes controversées qu'il propose dans un renvoi à la Cour suprême. M. Cowan a fait valoir que le gouvernement Harper avait déjà manifesté l'intention de soumettre un renvoi concernant le pouvoir d'Ottawa de créer une commission nationale des valeurs mobilières, une mesure à laquelle le Québec s'oppose également parce qu'il estime que cela relève de la compétence des provinces.

«Si le gouvernement Harper a accepté de le faire dans le cas d'une commission des valeurs mobilières, je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas le faire dans le cas de sa réforme du Sénat. Il serait sage de demander à la Cour suprême de se pencher sur cette épineuse question», a dit le sénateur Cowan.