Le 28 septembre, Denis Coderre a démissionné avec fracas de son poste de lieutenant québécois du Parti libéral du Canada. Michael Ignatieff a d'abord annoncé qu'il ne le remplacerait pas, avant de se raviser, cette semaine, et de nommer l'ancien astronaute et député de Westmount, Marc Garneau. Le nouveau représentant du chef libéral au Québec a reçu La Presse dans son bureau de la colline parlementaire, à Ottawa.

Q: Vous remplacez Denis Coderre à titre de représentant du chef libéral au Québec. Qu'allez-vous faire de différent?

R: Je vais vous dire ce que je vais faire. Ce qui est particulièrement important dans mon rôle, c'est non seulement de communiquer au nom du chef au Québec, mais plus particulièrement de communiquer avec le chef pour qu'il comprenne les enjeux, les préoccupations et les intérêts des Québécois.

 

Q: Le poste de lieutenant qu'occupait M. Coderre a été scindé en deux. Est-ce que c'était nécessaire? Est-ce que M. Coderre avait trop de pouvoir?

R: Je crois que la raison principale pour laquelle le poste a été scindé en deux, c'est parce qu'il y a beaucoup de travail pour une personne. M. Coderre avait fait beaucoup de travail du côté de l'organisation depuis neuf mois. Alors, je pense que c'est pour optimiser nos ressources. Moi, je vais me concentrer sur mes responsabilités et l'organisateur ou l'organisatrice va se concentrer sur l'aspect de l'organisation.

Q: Le rôle de représentant est exigeant. Vous n'avez pas une longue expérience en politique. Comment comptez-vous tirer votre épingle du jeu?

R: Moi, ma tâche, mon défi, c'est de rejoindre tous les coins du Québec, que ce soit les régions, que ce soit Montréal, que ce soit la grande région de la ville de Québec, et d'être là pour les écouter, pour savoir ce qui les préoccupe. Le secteur forestier, la culture, la recherche et le développement, le degré de préparation pour la grippe H1N1. Différents enjeux dans différentes parties du Québec. Je veux être sûr que mon chef comprenne bien ce que les Québécois veulent lui communiquer. Il faut que je sois sur le terrain, avec les gens.

Q: Au Québec, les derniers sondages indiquent que les appuis à votre formation politique sont actuellement en baisse. Comment entrevoyez-vous l'avenir du Parti libéral du Canada au Québec?

R: Je crois qu'il ne faut pas exagérer la situation au Québec. Si vous examinez la situation actuelle et si vous la comparez à celle d'il y a un an, on a vraiment fait du progrès du côté du membership, les coffres sont garnis parce qu'il y a eu beaucoup de collectes de fonds qui ont eu du succès et il y a beaucoup plus d'enthousiasme. Quand j'ai fait des tournées durant l'été, j'ai rencontré des Québécois qui étaient réceptifs. C'était quelque chose de très encourageant. Ils étaient prêts à réévaluer l'option du Parti libéral. Il y en a beaucoup qui ne sont pas satisfaits avec le Parti conservateur. Il s'agit pour nous de continuer à travailler pour que les Québécois décident de nous donner une chance.

Q: Sur les 75 sièges au Québec, le Bloc québécois en détient 47, le Parti conservateur en a 10, et les libéraux, 14. Quel est votre principal adversaire?

R: Les deux partis, le Bloc et les conservateurs. À propos du Bloc, je crois qu'il y a beaucoup de Québécois qui sont plus ouverts maintenant à choisir l'option libérale, parce que le Bloc, même s'il défend les intérêts du Québec, ne peut pas implanter de projets de loi. Le concret de la fonction d'un politicien, c'est d'être au gouvernement et de mettre en place des politiques, des projets de loi, qui représentent une réponse aux aspirations des Québécois. Je pense que certaines personnes sont prêtes à reconsidérer la façon dont elles votent parce qu'elles deviennent impatientes. Le Bloc peut parler de n'importe quel dossier, mais au bout du compte, il ne peut pas lui-même agir parce qu'il ne fera jamais le gouvernement.

Q: Deux élections complémentaires au Québec ont été déclenchées dimanche dernier. Quels sont vos attentes, vos objectifs pour ces scrutins du 9 novembre?

R: On va travailler très fort dans les deux comtés, pour que le Parti libéral soit visible et fasse de son mieux. Ce sont des partielles, c'est important qu'on soit présents sur le terrain. Moi, j'ai l'intention de me présenter dans les deux endroits - et je ne serai pas le seul - pour appuyer les candidats.

Q: Les sondages nationaux, cette semaine, accordent 14 points d'avance aux conservateurs de Stephen Harper. M. Ignatieff a reconnu, jeudi matin, qu'il y avait beaucoup de travail à faire. Comment comptez-vous remonter la pente?

R: On va remonter la pente si on est discipliné, si on présente nos arguments de façon efficace, pour qu'on puisse convaincre les Canadiens qu'on est une option qui est préférable à celle des conservateurs. Un de nos défis, c'est du côté de la communication. On doit mieux communiquer. Si, par exemple, on examine l'économie, en ce moment, le public semble, d'après les sondages, dire que le parti au pouvoir est en train de faire un travail raisonnable. La réalité, c'est que sur les dépenses des infrastructures, on a fait notre propre analyse et seulement 12% des projets ont amené des dépenses. Même si le gouvernement a dit que 80% a été annoncé, les experts disent que d'ici la fin de l'année, peut-être que 30% des projets seront en cours de route. On ne peut pas prétendre que ce que le gouvernement a fait à l'égard des infrastructures a vraiment stimulé l'économie cette année.

Q: Que ferez-vous si vous prenez le pouvoir dans les prochains mois?

R: M. Ignatieff a clairement indiqué qu'il fallait non seulement se sortir de cette récession, mais s'attaquer à cette nouvelle économie du savoir. Il a aussi dit qu'on n'augmenterait pas les taxes, qu'on ne changerait pas les transferts. Ce que ça veut dire, c'est qu'on va être obligés de faire certaines coupes, dans le sens d'être plus efficace, et aussi miser sur ce qui est la priorité: des programmes pour qu'on soit plus compétitif, plus innovateur.

Q: Est-ce que Michael Ignatieff est l'homme de la situation pour le Parti libéral?

R: Je crois que oui. Je pense qu'il fera un excellent premier ministre parce qu'il a de la vision. Il est entouré d'une bonne équipe, qui l'appuie entièrement. On va travailler fort et je suis confiant qu'on va éventuellement mériter la confiance des Québécois et des Canadiens.